6 novembre 2009 - JEAN-YVES GABBUD DANS LE NOUVELLISTE
VOTATIONS FÉDÉRALESLa gauche valaisanne combat l'initiative de l'UDC. Elle amène sur le devant de la scène Grégoire Sommer, un spécialiste des religions régulièrement cité par... Oskar Freysinger.
«L'UDC cherche non à comprendre l'impact réel du minaret sur les communautés musulmanes en Suisse, mais à mettre en opposition le monde occidental chrétien au monde musulman», déclare Grégoire Sommer.
Ce spécialiste des religions est souvent cité par le conseiller national UDC Oskar Freysinger dans le cadre des débats entourant l'initiative visant à interdire la construction des minarets en Suisse... alors qu'il s'oppose à cette initiative.
Le symbole du minaret
Grégoire Sommer s'est exprimé hier, à la Maison socialiste de Sion, lors d'une conférence de presse organisée par la gauche valaisanne.
Il a expliqué que le minaret a servi aux sunnites pour marquer leur territoire en Turquie dans le cadre de la lutte d'influence qui les oppose aux chiites. «Le minaret peut donc apparaître comme un symbole du pouvoir sunnite et être de ce fait instrumentalisé dans un conflit qui dépasse largement la question des musulmans en Suisse.» C'est sur cet aspect que repose une bonne partie de l'argumentation de l'UDC pour refuser l'érection de minarets en Suisse. Mais, déclare Grégoire Sommer «l'erreur de l'UDC consiste à présenter le minaret comme le symbole de la conquête musulmane en Europe». En fait, tous les musulmans ne voient pas d'un bon oeil les minarets. Ainsi les salafistes, les plus radicaux des musulmans, selon Grégoire Sommer, les rejettent «au nom de la pureté de la tradition».
Amalgames dénoncés
L'intellectuel déclare encore que l'UDC, «en confondant tout à la fois islam politique, néofondamentalisme et terrorisme, a en réalité pour objectif de rendre le débat non seulement virulent et passionnel, mais aussi approximatif et hystérique. En prônant le combat contre l'islamisme, promu comme la dernière des idéologies en date qui menacent les valeurs de l'Occident, l'UDC montre bien son impuissance, ou sa volonté, à apporter des réponses claires à des problèmes précis et complexes.»
La protection du droit suisse
Aux côtés du spécialiste des religion, socialistes, chrétiens-sociaux, les Verts et le mouvement Entremont Autrement ont tous affirmé hier haut et fort leur opposition à l'initiative UDC.
Pour le Vert Régis Chanton, avocat-notaire, le droit des constructions suisse est «une garantie suffisante pour empêcher toute édification extravagante, disproportionnée ou trop voyante d'un ou d'éventuels minarets dans nos villes et villages». Selon lui, aucun dérapage n'est à craindre de ce côté-là.
Une interdiction qui ne serait pas comprise
La chrétienne-sociale Denyse Betchov rappelle «qu'aucune démocratie au monde n'interdit le minaret, ce symbole architectural qui ne sert qu'à désigner un lieu de culte.» Pour elle, «aux yeux du monde extérieur, une telle interdiction serait incompréhensible, et en parfaite contradiction avec la réputation que la Suisse s'est faite au sein de la communauté internationale».
Aux yeux de Mathieu Bessero, membre d'Entremont Autrement, l'initiative des démocrates du centre comporte un risque important, celui de stigmatiser les musulmans et «ce sont justement dans les populations stigmatisées que naissent les révolutions et la violence».
«Non à la guerre des religions»
Le président du Parti socialiste valaisan, Jean-Henri Dumont, estime que l'initiative qui sera soumise au peuple suisse le 29 novembre prochain «met en péril la paix religieuse et nuit à l'intégration». Pour le député sédunois, «il n'y a pas de problème avec les musulmans en Suisse. L'UDC agite des leurres pour caresser son électorat dans le sens du poil, alors que ce parti est incapable de traiter les vrais problèmes de notre canton et de ce pays, comme l'emploi, le pouvoir d'achat, les primes des caisses-maladie ou l'intégration.»
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