mardi 16 décembre 2008

Les demandes de permis humanitaires sont reçues 4 sur 5

VaudASILE - En moins de deux ans, près de 600 requérants ont obtenu un permis B. Mais les renvois forcés ne sont pas stoppés pour autant. 
La crise de l'asile est passée, mais la situation reste précaire dans le canton de Vaud. Issu du durcissement de la politique fédérale, le régime d'aide d'urgence s'avère à la fois douloureux pour les personnes et difficilement praticable pour l'Etat. Mais il y avait aussi une bonne nouvelle au menu du point de presse tenu hier par le ministre Philippe Leuba: depuis 2007, près de 600 requérants d'asile ont obtenu un permis de séjour pour raisons humanitaires. 
Cette petite brèche dans la forteresse du nouveau droit d'asile permet à des requérants déboutés établis en Suisse depuis plus de cinq ans et considérés comme bien intégrés d'échapper au renvoi forcé. Depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, début 2007, plus de mille personnes ont tenté d'emprunter cette voie dans le canton. Le Service vaudois de la population a écarté près d'un quart des demandes, jugeant qu'elles ne répondaient pas aux critères. Il n'existe pas de voie de recours contre la décision du canton. Les recalés peuvent néanmoins déposer une nouvelle demande... s'ils n'ont pas été expulsés dans l'intervalle. 
Sur les 715 personnes dont le canton a défendu la cause auprès de l'Office fédéral des migrations, 588 personnes, soit quatre cinquièmes, ont décroché un permis B. La réponse a été négative pour 36 autres, alors que 91 sont encore dans l'expectative. 
Le mouvement vaudois de résistance aux renvois aurait-il incité l'administration fédérale à plus de clémence? On est bien au-delà en effet du taux de 50% qui avait été négocié en 2004 entre l'ancien conseiller d'Etat Pierre Chiffelle et Christoph Blocher. Sur les 1273 demandes humanitaires soumises à Berne par le canton, 523 avaient alors été refusées, déclenchant une crise dont ce chiffre est devenu l'emblème. Il faut encore y ajouter 175 Ethiopiens et Erythréens, dont les demandes avaient été rejetées sans même faire l'objet d'un examen. 
Presque tous ont fini par obtenir le droit de rester. Dans le groupe des «523», les renvois forcés se sont comptés sur les doigts d'une main. Deux personnes sont encore en attente d'une décision fédérale, et une a échoué à l'aide d'urgence. Tous les autres ont été régularisés. Idem dans le groupe des 175, hormis deux départs et une disparition administrative. Les renvois forcés de requérants d'asile n'ont pas été stoppés pour autant. Hier, Philippe Leuba s'est fait fort de souligner que Vaud recourt davantage aux mesures de contrainte que la moyenne suisse. Au 30 novembre, 86 personnes avaient été renvoyées par la force en 2008. Le ministre libéral veut mettre la priorité sur ceux qui «ne respectent pas l'ordre juridique suisse». Figurent sur cette liste noire les personnes condamnées pour des délits pénaux à deux ans d'emprisonnement au minimum, en une ou en plusieurs fois. Mais le chef du Service de la population, Henri Rothen, assure que ce critère ne suffit pas à entraîner une expulsion; il ne fait que hâter l'exécution d'une décision négative sur une demande d'asile. 
Autre problème abordé hier: l'aide d'urgence, assistance au rabais à laquelle sont relégués les requérants déboutés et les NEM (non-entrée en matière). Analyse de Philippe Leuba: «C'est un régime très dur, et qui a pour vocation de dire à ceux qui n'ont pas d'avenir en Suisse qu'ils doivent rentrer chez eux, même si c'est un discours souvent difficile à tenir.» Et puis, sur le terrain, ça ne marche pas vraiment: une importante minorité (20% dans le canton de Vaud) d'entre eux s'installe durablement à l'aide d'urgence. Dit crûment, cela ne fait pas le beurre du canton, qui ne touche qu'un forfait unique de la Confédération. Mais cela pose surtout des problèmes sociaux. Comme on leur interdit de travailler et de faire le moindre projet d'avenir en Suisse, les déboutés et les NEM se retrouvent désoeuvrés, et souvent désespérés. 
Philippe Leuba a annoncé hier plusieurs mesures pour atténuer ces problèmes. Le canton développera des programmes d'occupation à l'intention de ceux qui ont plus de trois ans de séjour en Suisse. Tous seront affiliés à l'assurance-maladie, ce qui n'est pas le cas actuellement. Comme l'a exigé récemment la Cour administrative du Tribunal cantonal, les personnes hébergées dans des foyers devront avoir à disposition un «espace d'intimité» pour y recevoir des visites. Enfin, un module de cours sera mis sur pied pour améliorer la formation du personnel surveillant

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