jeudi 16 octobre 2008

Miss Suisse victime d'insultes racistes

Image_6[1]Sur internet, l’Yverdonnoise Whitney Toyloy est comparée à un «abcès» par un membre du Parti des nationalistes suisses (PNOS). Une procédure pénale a été ouverte.Un article de Nadine Haltiner dans 24 Heures. 
Elle incarne l’ab cès qui est déjà en train de dévorer la Confé­dération libre et indépendante.» Voilà comment Dominic Lüthard, membre du Parti des nationalistes suisses (PNOS), dépeint Whitney Toyloy dans un article publié le 11 octobre sur le site internet de sa section de Langenthal (BE). Des propos que les autorités bernoises n’apprécient guère. Hier, elles ont ouvert une procédure pénale con­tre le parti d’extrême droite. Elles invoquent une éventuelle violation de la norme pénale antiraciste.
Sur la page de garde du site, l’homme n’hésite pas à fustiger vertement la nouvelle Miss Suisse et sa dauphine. En ligne de mire: leur couleur de peau métisse et leurs origines internationales. «A la première place, nous avons Whitney Toyloy, la Suissesse noire qui a vécu à Singapour, en Espa­gne et aux Etats-Unis. Bref, typi­quement Suisse! A la deuxième place, nous avons hérité de Rekha Datta, qui a des origines indien­nes.
Deux personnes qui n’ont pas de racines suisses. Et celles-ci doi­vent représenter le pays? Non.»
Whitney ne s’exprime pas

Whitney Toyloy, qui disait vou­loir incarner la Suisse multicultu­relle, est-elle blessée par ces pro­pos? Peut-être. Mais la Vaudoise ne communiquera pas, prévient le comité de Miss Suisse. «Nous vou­lons éviter toute polémique, expli­que Christoph Locher, son direc­teur. En plus, nous ne souhaitons pas faire de pub à ce groupe politique.» Le père de Whitney ne s’exprimera pas non plus. Nous l’avons joint hier lui avons appris l’existence de ces critiques. D’un ton ferme mais poli, il a préféré éviter tout commentaire.
Nul ne sait si sa fille portera plainte. Le comité de Miss Suisse assure de son côté qu’il n’en fera rien. Il préfère laisser faire la jus­tice. La procédure pénale, ouverte d’office par le Service régional des juges d’instruction de la région Emmental-Oberaargau, devra dé­terminer si les propos de Dominic Lüthard tombent bel et bien sous le coup de la norme antiraciste, au sens de l’article 261bis du Code pénal.
Jusqu’à présent, cet article a surtout été invoqué pour poursui­vre des négationnistes. Rarement pour des propos tenus envers des personnes précises. Mais pour Charles Poncet, l’aboutissement judiciaire ne fait aucun doute. «Ces propos sont dégueulasses, s’offusque l’avocat genevois. Ils remplissent les trois critères per­mettant de conclure à une discri­mination raciale. Premièrement ils sont tenus dans un espace public, deuxièmement ils peuvent être considérés comme un appel à la haine raciale, troisièmement ils portent atteinte à la dignité hu­maine, parce qu’ils comparent les personnes de couleur à des «ab­cès ».
Propos pas retirés

Un avis partagé par Tom Fris­chknecht, spécialiste bernois en droit pénal. Cité hier par la Berner Zeitung, il estime que Dominic Lüthard pourrait être condamné à une peine pécuniaire pouvant al­ler jusqu’à un million de francs au maximum. Une menace qui ne fait pas reculer l’intéressé. «J’ai con­sulté des avocats avant d’écrire ces lignes et je sais que je ne risque rien, affirme le nationaliste. Je ne retirerai donc pas mes propos de notre site tant qu’il n’y aura pas condamnation.» Le parti d’extrême droite, sur­tout actif en Suisse alémanique, n’en est pas à son coup d’essai. Plusieurs de ses adhérents – une centaine au total – ont déjà été condamnés pour des propos racis­tes. Lors de l’élection de Ricardo Lumengo (PS/BE) au Conseil na­tional en 2007, la formation, qui veut «une homogénéité ethnique et culturelle du peuple», avait fus­tigé le fait qu’un Noir puisse repré­senter le pays.

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