Prudent L’élection de Carl-Alex Ridoré marque-t-elle une évolution de la place de la minorité noire en politique? «Je suis conscient de la portée symbolique d’un tel événement, reconnaît le nouveau préfet. Même si je n’en ai jamais fait un cheval de bataille.» (KEYSTONE)
Le socialiste Carl-Alex Ridoré, d’origine haïtienne, sera le prochain préfet du district fribourgeois de la Sarine. Quelle portée pour cette élection d’un candidat noir, huit mois après celle du premier conseiller national de couleur, Ricardo Lumengo? Un article de Valentine Zubler, dans 24 Heures.
Les citoyens du district de la Sarine ont tranché. Le Fribourgeois Carl-Alex Ridoré, socialiste d’origine haïtienne, est devenu hier, lors du second tour de l’élection, le premier préfet noir de Suisse. Récoltant 11 706 suffrages (59,7% des voix) contre 7914 au démocrate-chrétien Hubert Dafflon, l’étoile montante du PS a fait tomber, du coup, la dernière préfecture PDC du canton dans l’escarcelle de son parti.
La participation a atteint 35,5%, soit une nette baisse par rapport aux 47% du premier tour le 1er juin, où Ridoré était arrivé largement en tête. Le docteur en droit de 36 ans succédera ainsi, le 1er septembre, au démocrate-chrétien Nicolas Deiss.
Le premier préfet noir de Suisse, donc, a été élu à une large majorité. Et cela, huit mois après l’entrée sous la Coupole du premier conseiller national helvétique de couleur, le socialiste bernois d’origine angolaise, Ricardo Lumengo. Tout un symbole pour les Africains vivant dans notre pays, quatorze ans après l’élection à Bulle d’André Ntashamaje (PS), Rwandais d’origine, premier président noir d’un Conseil général suisse. Cette nouvelle élection d’hier marque-t-elle une évolution de la place de la minorité noire en politique?
Pas un cheval de bataille
«Je suis conscient de la portée symbolique d’un tel événement, reconnaît Carl-Alex Ridoré. Même si, répète-t-il volontiers, je n’en ai jamais fait un cheval de bataille.» A en croire le juriste, né et ayant grandi à Fribourg, il n’y a rien de révolutionnaire dans son élection: «Le district de la Sarine s’est de toute façon toujours montré très ouvert», conclut le futur préfet. Le politologue Georg Lutz se garde lui aussi d’évoquer une tendance. «Il est vrai aussi que cette élection est le signe d’une certaine ouverture de la politique, dans les milieux de gauche surtout, où ces candidats s’engagent plus naturellement », note le politologue.
Et à droite? «Une partie des représentants de ces formations a besoin de plus de temps pour s’ouvrir à cette évolution», souligne Georg Lutz. Selon lequel, «ces élections, surtout celle de Ricardo Lumengo, constituent aussi, partiellement, une réaction à la campagne de l’UDC sur les moutons noirs. Il y a eu un effet de solidarisation.»
Facteur politique
Reste que l’élection de CarlAlex Ridoré, espoir du PS fribourgeois, ne constitue pas une surprise. Le socialiste était par ailleurs soutenu par l’ensemble de la gauche, tandis que le candidat PDC Hubert Dafflon était bien esseulé. Les radicaux n’avaient en effet pas donné de mot d’ordre à leurs troupes et l’UDC n’invitait pas ses membres à se rendre aux urnes ou leur conseillait de voter blanc, les deux candidats ne lui convenant pas, car trop à gauche.
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