lundi 19 mai 2008

Nombreuses réactions

Le Courrier des lecteurs de 24 Heures recueille de nombreuses réactions avant les votations sur les naturalisations par les urnes.

Non à des mesures de bas étage
Sommes-nous en train de re­tourner au Moyen Age? Allons­nous mettre au pilori des per­sonnes pour qu’elles soient jugées sur un CV par tout le monde? Il faudrait se rendre vraiment compte de ce que ce genre de mesure peut signifier.
C’est la porte ouverte au tribu­nal populaire, au lynchage public et à toute forme discri­minatoire par le commun des mortels. C’est la porte ouverte au délit de sale gueule, au voisin qui ne plaît pas, bref, à une forme de dictature du peuple. Ne nous y méprenons pas, ce n’est pas – et de loin – le chemin vers la liberté.
L’exemple d’Emmen n’a-t-il pas ouvert les yeux des uns et des autres sur le danger d’une telle mesure? Ceux qui seraient tentés de suivre cette initiative devraient prendre conscience qu’en se lançant dans ce proces­sus, ils ouvriront une porte béante à d’autres du même genre où chaque personne pourra être – un jour aussi – la tête de Turc de son voisin. Nos institutions sont bonnes, n’al­lons pas les mettre en péril par des mesures de bas étage.
Erika et Gérard Blanc,
Crissier
Les naturalisés ne sont pas des criminels

Etranger de troisième généra­tion, naturalisé à l’âge de 17 ans (j’en ai 30), je consulte scrupu­leusement comme à chaque votation le matériel de vote. En parcourant l’argumentaire du comité «Pour des naturalisa­tions démocratiques», je n’ai pu m’empêcher de sentir la mou­tarde me monter au nez en lisant l’extrait suivant: «Les naturalisés ont le droit de décider dans l’urne de l’avenir de la Suisse. Et ils ne se prive­ront pas de ce droit. Voilà pourquoi il faut être prudent en octroyant le droit de cité suisse.» Si, il y a treize ans, je me suis naturalisé, ça n’était pas pour remplacer les vaches par des chameaux, la fondue par la choucroute ou même le chasse­las par du chardonnay. Non, j’aime cette nation pour ce qu’elle est, pour ses valeurs, sa culture, ses paysages. Si je n’aimais pas ce pays, j’aurais gardé mon ancien passeport.
Alors prétendre qu’en me donnant le droit de vote, je dénaturerai «mon» pays, je considère cela comme une insulte à mes valeurs, à nos valeurs. Cette initiative, en plus de jeter le discrédit sur toute personne naturalisée, se moque du peuple. Le système est dé­tourné pour transformer la démocratie en outil de propa­gande politique. Alors, en tant que Suisse, je voterai non le 1er juin.
Miguel Martinez,
Gillarens
Appellation d’origine non contrôlée

Mais comment l’UDC peut-elle encore justifier son appellation d’origine? Union? En la matière c’est bien la désunion qui pré­vaut. Démocratique? L’UDC veut éjecter ses conseillers fédéraux élus démocratique­ment et propose de museler le Conseil fédéral. Du centre? Qui peut croire que l’aile dure me­naçante et xénophobe de l’UDC est au centre? J’ai honte que la loi puisse tolérer ces affiches xénophobes avec de telles insul­tes gratuites aux étrangers, en pleine rue et dans les journaux.
Donc les trois objets sont contre l’union, contre la démo­cratie, et en tout cas pas cen­tristes. Pire, ils proposent: une santé à deux vitesses, de jouer contre les droits de l’homme en privant les étrangers de tout recours à des décisions arbitrai­res, et de museler le Conseil fédéral. Les UDC qui portent encore en eux ces valeurs origi­nelles de l’union, qui chérissent la démocratie et se positionnent au centre iront refuser ces trois objets, non?
En tout cas, mobilisons-nous pour le faire, pour que le CF puisse continuer de s’exprimer, pour continuer d’accorder la nationalité suisse à ceux qui répondent aux normes strictes clairement établies et appli­quées, et enfin pour éviter une médecine à deux vitesses et pouvoir choisir notre médecin.
Glissons trois non le 1er juin dans les urnes.
Frédéric Charpié,
président du Parti socialiste du Jura bernois, Les Reussilles
Vers la dictature

L’UDC nous y mène tout droit en ne donnant à ses membres que la seule alternative d’ex­clure Mme Widmer ou de quitter le parti. Pour un Chris­toph Blocher qui n’a que le mot de démocratie à la bouche, c’est plutôt raté. Le parlement a nettement manifesté sa volonté de se défaire de ce personnage encombrant.
Que les médias cessent de nous en parler.
Bernard Jacot,
Blonay
Statistique contestable

Dans la propagande de l’UDC en faveur du oui à son initiative sur les naturalisations, on peut lire: «Bientôt, les étrangers naturalisés décideront du sort de la Suisse.» Statistiquement parlant, cela me paraît très contestable.
De plus, cette façon de dire est absurde. II y a dans notre pays deux catégories de gens: des Suisses et des étrangers.
Quand un étranger obtient la bourgeoisie d’une de nos com­munes, il devient Suisse. Un «étranger naturalisé», ça n’existe pas plus qu’une «sphère cubique» ou qu’une «froidure torride».
Claude-Henri Rochat,
Bussigny
Indigne de notre Etat de droit

Laisser le corps électoral de chaque commune déterminer quel est l’organe compétent pour accorder la naturalisation, organe – qui pourrait être le peuple – dont les décisions n’auraient pas à être motivées et seraient définitives (pas de recours possible). Telle est la proposition portée par l’initia­tive UDC «Pour des naturalisa­tions démocratiques» et que nous devons impérativement rejeter tant elle ne peut con­duire qu’à des décisions émo­tionnelles et irrévocables, ne reposant sur aucun critère défini et mesurable en termes d’intégration notamment. Une initiative qui n’apporte aucune solution aux vraies questions d’intégration, qui est indigne de notre Etat de droit, respective­ment de notre démocratie. Et donc, à rejeter!
Cédric Barde,
vice-président du Parti libéral vaudois, Sugnens
Quelle procédure de naturalisation?

Membres de la Commission de naturalisation à Vevey, nous nous exprimons au sujet de la prochaine votation sur la natu­ralisation.
L’initiative est trompeuse car la procédure actuelle est démo­cratique. Elle permet aux com­munes de statuer en toute objectivité sur les candidatures.
A Vevey, la Commission com­posée d’élus du Conseil et d’un membre de la Municipalité représente donc le peuple. Elle examine les dossiers, auditionne chacun des candidats puis préavise à la Municipalité, qui décide d’accorder le droit de cité. Nous constatons que les candidats sont motivés à deve­nir Suisses; exprimant parfois avec émotion leur attachement s’appelle de la discrimina­tion.
En dernier lieu, la responsa­bilité partagée des communes et du canton disparaîtrait, ce qui renie notre structure fédé­raliste et diversifie à l’excès les procédures de naturalisation.
Appliquons les droits formu­lés dans notre Constitution avec le souci de la justice et de la solidarité; nous voterons non à cette initiative.
Josette Barhoumi et Jean-François Fave,
au nom d’une majorité des membres de la Commission, Vevey
Mieux vaut être beau et bien portant!

«Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas que l’on te fasse.» Ce précepte de sagesse, qui nous vient de Confucius, qui ne l’a pas entendu de ses proches en étant enfant? Il semblerait bien que devenus grands, certains politiciens l’aient oublié. Cette sagesse est pourtant devenue une règle sociale qui permet de vivre en harmonie les uns avec les autres.
Alors imaginez un peu que ce soit vous qui demandiez la naturalisation dans un pays où vous auriez immigré, un pays où vous travaillez, dont vous avez appris la langue, où vous avez des amis, où vos enfants vont à l’école, où vous désirez poursuivre votre vie… Et on vous demanderait de fournir toutes sortes d’informations privées, votre revenu, vos éven­tuels démêlés avec les autorités, si vous recevez de l’aide sociale, votre état de santé, pour les publier et les donner en pâture à tous les habitants de votre ville? Et vous, vous savez que la seule chose qui compte pour les personnes qui ne vous connais­sent pas et qui doivent juger de votre demande, c’est la conso­nance de votre nom et votre visage! Vos efforts pour vous intégrer, votre volonté de pour­suivre ces efforts, rien de cela ne compterait plus… Avec des naturalisations par les urnes, ne pourraient être naturalisés que ceux et celles qui sont beaux, bien portants, pas trop pauvres, dont le nom ne sonne pas trop «d’ailleurs».
Cette sélection-là, c’est celle qui est implicitement visée par cette initiative dont l’intention est nauséabonde, celle d’un eugénisme social qui ne veut pas dire son nom.
Valérie Borioli Sandoz,
Granges-près-Marnand

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