lundi 8 octobre 2007
Manifestation "néo-fasciste" à Genève ?
Lire cet inquiétant article dans la Tribune de Genève
Une annonce a circulé toute la semaine passée sur le Net annonçant samedi un «Meeting contre le racisme antiblanc» organisé par les Jeunesses identitaires à Genève. En s'y rendant, on s'attendait à se retrouver en face de crânes rasés portant bombers et croix gammées. Surprise, dans une salle privée d'un quartier populaire, la cinquantaine de jeunes de 16 à 25 ans ont plutôt l'allure du gendre idéal: cheveux bien coupés, lunettes, chemises à carreaux et chaussures Converse.
Pourtant, des signes laissent songeur. Certains portent des chemises noires. Un sympathisant arbore le slogan fighting for Europe sous lequel est dessinée une kalachnikov. Mis à part les drapeaux suisse et genevois pendus aux murs, une banderole représente un gladiateur romain avec l'inscription Ave Europa. Qui sont ces Jeunesses identitaires? Des extrémistes de droite, des skinheads? «Regardez dans la salle, est-ce que vous voyez ce type de personnes? Nous ne sommes pas violents. On nous salit, on veut nous associer à ces groupes», répond Pierre Graillard, président du mouvement. Il décrit les Jeunesses identitaires, nées à Nice en France il y a cinq ans, comme un mouvement de «droite sociale et identitaire».
«Sale scheuz»
Les Jeunesses identitaires s'opposent à l'Union européenne et défendent une Europe de type fédéral, de spiritualité chrétienne et aux racines gréco-latines. Elles refusent toute société multiculturelle ou métissage.
Jean-David Cattin, 22 ans, le responsable de la section genevoise qui existe depuis deux ans, commence sa diatribe: «Au Cycle d'orientation de nos jours, c'est plutôt à la mode de ne pas être Suisse. Le Suisse, c'est le gars avec des sous, le type pas cool. Le terme «sale scheuz» est de plus en plus utilisé pour le décrire». Dans un discours huilé, bien construit, il poursuit en évoquant les viols collectifs commis aux Grisons l'an passé et au Lignon en novembre 2005: «Des étrangers ont réussi à justifier ces actes en affirmant que les victimes portaient des jupes trop courtes, ça, c'est du pur racisme antiblanc.» Les applaudissements fusent. Les participants, des collégiens ou des apprentis pour la plupart, écoutent sans poser la moindre question. André*, un apprenti de commerce de 16 ans, participe parce qu'un ami lui a parlé de cette réunion. Il ressent un malaise au sein de son club de foot et affirme être pris à partie dans la rue. «Nous ne reconnaissons bientôt plus notre pays», estime Philippe*, 19 ans, étudiant à l'Ecole de commerce.
Pas à l'aise dans un monde de plus en plus cosmopolite, les membres des Jeunesses identitaires veulent tout simplement rester entre Blancs. «Si l'on ne se bat pas, à la fin du siècle, nous n'existerons peut-être plus», conclut leur président.
«Ne vous fiez pas à l’apparence de gentils patriotes»
Trois observateurs les classent dans la mouvance néofasciste européenne.
«Faite attention, ils ne sont pas les gentils patriotes qu’ils disent», estime Daniel Schweizer. Le réalisateur, auteur d’une trilogie sur les skinheads, dont «White Terror», les situe politiquement dans la lignée des mouvements néofascistes européens: «Ils tiennent un discours raciste pour la préservation de la race blanche». Karl Grünberg, secrétaire d’Accord SOS Racisme note qu’ils présentent toutes les caractéristiques du fascisme qui prévalait en Italie dans les années vingt. «Anti-autorité, antimarché, antilibéral, c’est un attrape-tout en direction de la jeunesse. Ils recrutent essentiellement dans les milieux intellectuels et élitaires», note-t-il.
Un avis partagé par Marco Brandler, assistant en sciences politiques de l’Université de Genève: «Ils essaient d’intellectualiser leur discours. Dans les milieux d’extrême droite, il n’y a plus seulement les skinheads traditionnels aux crânes rasés.» Les mouvements, tels que les Jeunesses identitaires, demeurent discrets en Suisse romande. Pourtant, ils sont en progression. La radicalisation du discours politique en Suisse sous l’influence de l’UDC qui place les thèmes de l’immigration et du nationalisme au centre de la vie politique suisse, leur est favorable. Ils se sentent légitimés parce qu’un grand parti pousse ces thématiques et peuvent ainsi s’engouffrer dans la brèche.
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