Lire l'édito de Didier Estoppey dans le Courrier
Elle reste quelque peu dans l'ombre d'une nouvelle loi sur l'asile qui lui vole la vedette. La Loi sur les étrangers (LEtr), également soumise au vote référendaire le 24 septembre, n'en représente pas moins elle non plus un enjeu central. D'abord parce que nombre de ses dispositions concernent principalement les requérants d'asile, notamment celles sur les mesures de contrainte (lire ci-dessus). Mais aussi parce qu'elle va bien au-delà de son intention proclamée d'offrir un «dépoussiérage» de la Loi sur le séjour et l'établissement, qui date de 1931, et qu'elle viendra remplacer si elle est acceptée en votation.
La LEtr commence par poser un principe cardinal, en distinguant les migrants entre les Européens, qui bénéficient de la libre circulation des personnes, et tous les autres, les seuls auxquels elle s'applique. De façon très restrictive, puisqu'elle décrète que seuls les cadres, spécialistes, chefs d'entreprise ou membres de diverses autres élites seront éligibles pour un permis de travail. Plusieurs pays, tels ceux des Balkans et la Turquie, qui ont fourni à la Suisse d'importants contingents de main-d'oeuvre, basculent ainsi dans ce deuxième cercle auquel on ferme quasiment les vannes. Et dont proviennent environ 40% des migrants vivant actuellement en Suisse...
Au-delà de cette révolution, dans laquelle ses opposants voient un cadre légal donné au racisme, la LEtr et ses 128 articles comprennent de nombreuses dispositions très critiquées. Outre celles permettant de punir ceux qui aident les sans-papiers (lire notre éditorial), les principales visent le regroupement familial, auquel sont apportées des restrictions drastiques. Alors qu'aujourd'hui, les mineurs jusqu'à 18 ans peuvent sans autre rejoindre leurs parents en Suisse, la LEtr impose un délai de cinq ans après l'arrivée des parents. Ce délai est même ramené à une année pour les enfants de 12 à 18 ans.
Les opposants dénoncent d'ailleurs quantité d'autres ingérences dans la vie privée, telle l'obligation faite aux candidats au regroupement familial de vivre sous le même toit ou la suppression du permis de séjour aux conjoints et enfants étrangers en cas de séparation du couple avant trois ans. La latitude donnée aux officiers d'état civil de traquer les «mariages blancs» est un autre point très contesté de la LEtr.
Il faut enfin parler d'une autre modification de taille: si le délai pour transformer un permis B en permis C est ramené de dix à cinq ans, il n'y aura plus de droit automatique au permis d'établissement. Celui-ci sera lié au «degré d'intégration» du migrant, auquel sont priées de veiller les autorités cantonales. Des cours de langue ou d'intégration pourront d'ailleurs être imposés à tout candidat à une autorisation de séjour, même de courte durée, ou au regroupement familial, prévoit la LEtr dans son article 54.
Mais la LEtr fait également beaucoup parler d'elle pour ce qu'elle ne prévoit pas... Elle reste ainsi totalement silencieuse quant aux possibilités de régularisation des quelque 100000 sans-papiers qui, selon les estimations des autorités fédérales elles-mêmes, travaillent en Suisse. Et qui ne vont certainement pas plier spontanément bagage si la loi est acceptée le 24 septembre...
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