Lire l'éditorial de Didier Estoppey dans Le Courrier
«Nous sommes la Suisse!» C'est sous cette bannière que seront réunis, ce samedi à Berne, toutes celles et ceux qui iront clamer dans les rues leur refus des politiques de peur et d'exclusion dans lesquelles la majorité politique de ce pays prétend nous enfermer. On souhaite festive cette manifestation, qui marque le lancement de la campagne du double «non» aux lois sur l'asile et les étrangers, soumises à votation le 24 septembre.
Une campagne qui démarre sous les meilleurs auspices. Les six mois qui se sont écoulés depuis le vote infâme des Chambres fédérales, le 16 décembre dernier, ont en effet déjà permis de constater que la société helvétique n'est pas aussi sourde et aveugle que ses dirigeants. Et que, même s'il serait bien imprudent de préjuger du résultat final, elle n'est pas forcément prête à se boucher le nez pour se coucher aux ordres de Christoph Blocher et de ses valets.
Après les sections genevoise et vaudoise du Parti démocrate-chrétien, ce sont ainsi les radicaux genevois et les libéraux vaudois qui viennent de rompre avec le camp bourgeois en adoptant des consignes négatives pour le 24 septembre. Avec des nuances: les radicaux genevois rejettent la loi sur l'asile mais soutiennent la loi sur les étrangers, alors que leurs «cousins» vaudois ont pris l'option exactement inverse...
Une incohérence qui a le mérite de montrer, s'il en était encore besoin, à quel point ces deux lois sont unies dans le rejet de l'autre et dans la négation des droits humains les plus élémentaires. Mais l'étrange exercice de casuistique auquel se sont livrés ces deux partis a le mérite d'ouvrir un champ nouveau dans la campagne: celui de la réflexion et de la rationalité.
Si nous nous opposons à la loi sur l'asile, c'est qu'elle est inutile et inapplicable, ont estimé en substance les radicaux genevois. En poussant encore un peu la réflexion, ils constateront que celle sur les étrangers, qui condamne à la clandestinité tout immigrant extra-européen ou consacre la présence des officiers d'état civil dans les chambres à coucher des couples mixtes, l'est tout autant...
Il ne saurait évidemment être question de relativiser les valeurs éthiques qui nécessitent à elles seules le rejet de ces deux lois. Mais les référendaires doivent veiller à ne pas se laisser enfermer dans le camp de l'humanisme, de «l'angélisme». Comme cherche à le faire Christoph Blocher, en déniant aux Eglises le droit de se mêler de politique (lire notre édition du 14 juin). Et en prétendant incarner à lui seul le champ de la rationalité. Sans réussir pour autant à masquer son vrai visage: le racisme du «bon missionnaire» blanc, dont le retrait se serait avéré fatal à une Afrique incapable de se prendre en mains...
Face à une telle abjection au sommet, il est temps de serrer les rangs. Il reste trois mois pour convaincre la population. Avec le coeur, mais aussi la raison. Ce n'est qu'en marchant sur deux pieds que ce pays pourra faire façon du cancer fascisant qui le ronge.
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