lundi 13 septembre 2010

Un texte sur les Roms sème la confusion à l’Elysée

 

Des campements doivent être évacués, "en priorité ceux des Roms", a dit N.Sarkozy. [Reuters]

Des campements doivent être évacués, "en priorité ceux des Roms", a dit N.Sarkozy. [Reuters]

Une circulaire traitant expressément de l'évacuation des Roms provoquait une confusion au sein du gouvernement français lundi. Le document, en cours d'étude par la Commission européenne, est totalement assumé par certains, pas du tout par d'autres. De son côté, l'ONU fait part de ses inquiétudes.

Le document, issu du ministère de l'Intérieur, date du 5 août, mais a été révélé vendredi dernier. La circulaire rappelle en préambule aux préfets les "objectifs précis" fixés par le président Nicolas Sarkozy: "300 campements ou implantations illicites devront avoir été évacués d'ici trois mois, en priorité ceux des Roms". Le texte reprend à plusieurs reprises la formule: "en priorité ceux des Roms".

Cafouillage

"Je ne connaissais pas cette circulaire", a assuré lundi le ministre de l'Immigration Eric Besson. "Le concept de minorités ethniques est un concept qui n'existe pas chez nous", a ajouté le ministre, qui a toujours affirmé que la France n'avait pris "aucune mesure spécifique à l'encontre des Roms".

Cette circulaire "est la traduction de notre politique et je l'assume tout-à-fait", a lancé de son côté le patron du parti présidentiel UMP Xavier Bertrand sur la radio RMC. "Les campements sont illégaux, ils sont démantelés en vertu de décisions de justice", a-t-il expliqué en dénonçant "l'hypocrisie" du parti socialiste et des "associations de bien pensants".

Sous la loupe de la Commission européenne

La Commission européenne a rappelé lundi qu'aucune catégorie de population ne pouvait être visée en Europe du fait de son origine ethnique. L'exécutif européen, chargé de faire respecter les traités dans l'UE, s'est cependant refusé dans l'immédiat à juger la circulaire sur le fond.

"Nous étudions ce document", a dit le porte-parole de la Commission pour les questions de justice et de droits des citoyens, Matthew Newman, qui a précisé que le texte était "sur internet".

La Haut Commissaire de l'ONU est inquiète de la "nouvelle politique française". [AFP]

"On est en train de dresser le procès européen de la France pour la façon dont une circulaire est rédigée", s'est exclamé en réaction Pierre Lellouche, en marge d'une réunion à Bruxelles avec ses homologues européens. Pour le secrétaire d'Etat français chargé des Affaires européennes, son pays n'a pas de leçon à recevoir et est "souverain".

Des critiques de tout horizon

Depuis sa révélation, le texte du ministère de l'Intérieur a suscité de nombreuses oppositions en France même, notamment celle de l'ex-dirigeant du parti socialiste François Hollande, qui l'a qualifié "d'immoral et illégal". Le Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti) a annoncé dimanche préparer un recours devant le Conseil d'Etat, plus haute juridiction administrative, jugeant le texte discriminatoire.

La politique envers les Roms ainsi que le virage sécuritaire engagé cet été par le président Nicolas Sarkozy ont valu à la France des accusations de "racisme d'Etat". Jeudi, le Parlement européen a demandé à la France la suspension immédiate des renvois de Roms. En août, le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale de l'ONU (CERD) a dénoncé plus globalement un "manque de volonté politique" face au racisme. L'ancien président cubain Fidel Castro pense pour sa part que le président français Nicolas Sarkozy est en train de devenir "fou".

Depuis cet été, plus d'un millier de Roms ont été renvoyés en Roumanie et en Bulgarie, moyennant une aide de 300 euros par adulte et de 100 euros par enfant.

afp/bri sur le site de la RSR

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