Le directeur de l’Office fédéral des migrations affirme qu’une majorité de requérants d’asile du Nigeria viennent en fait en Suisse pour s’y adonner à des activités criminelles. Les statistiques policières montrent qu’ils sont nombreux à être actifs dans le trafic de cocaïne. Un article de 24 Heures signé par Serge Gumy.
«Avec 1800 demandes l’an dernier, les Nigérians constituent le plus fort effectif des requérants d’asile – 99,5% d’entre eux sans la moindre chance de pouvoir rester en Suisse. Ils ne viennent pas ici comme réfugiés, mais pour y faire des affaires illégales.» Alard du Bois-Reymond a lancé un pavé dans la mare dimanche. Pour le nouveau directeur de l’Office fédéral des migrations, en poste depuis le début de l’année, le Nigeria constitue même le problème numéro un de l’asile en Suisse. Et il promet de l’empoigner avec fermeté.
Présents dans la coke
Les requérants d’asile du Nigeria sont-ils tous des criminels? «Pour ce qui concerne le trafic de cocaïne de rue, les dealers proviennent à 99,5% d’Afrique de l’Ouest, explique Jean-Christophe Sauterel, porte-parole de la police cantonale vaudoise. Depuis deux ou trois ans, les Nigérians se sont ajoutés aux francophones du Burkina Faso, de Guinée-Bissau et de Guinée-Conakry. Clairement, ces gens viennent chez nous pour trafiquer. Ils arrivent en Suisse formés et sont opérationnels assez vite.»
Et les chiffres, que disent-ils? Selon l’Office fédéral de la statistique, 585 Nigérians ont été prévenus de trafic de stupéfiants en 2009 en Suisse (9% du total), dont 462 pour trafic de cocaïne (22% du total). Par ailleurs, dans le canton de Vaud, selon le juge d’instruction cantonal Jean Treccani, 17 des 97 dossiers de trafic de stupéfiants actuellement ouverts (toutes substances confondues) concernent des ressortissants de cet Etat.
Juges et policiers l’affirment: pour renvoyer ces trafiquants, le plus difficile consiste à établir leur identité. Quand ils y parviennent, le Nigeria ne rechigne pas à reprendre ses ressortissants. Les renvois forcés vers Lagos ont toutefois été suspendus depuis la mort à Zurich d’un requérant de 29 ans lors de son renvoi, le 17 mars dernier. «Ces propos provocateurs, inacceptables et racistes visent précisément à faire diversion de cette mort tragique», accuse Dozie Celeste Uguchukwu, président de la diaspora nigériane en Suisse.
«Un refrain connu»
«Je suis convaincu moi aussi que les Nigérians jouent un rôle important dans le trafic de cocaïne. Mais les déclarations d’Alard du Bois-Reymond sont extrêmes, déplore Beat Meiner, secrétaire général de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR). Pauvreté, violences ethniques: la situation au Nigeria est très difficile. Ces personnes viennent en Europe avant tout pour gagner leur vie. Quant à M. du Bois-Reymond, il entonne un refrain connu: «Tous dehors!» Mais nous sommes inquiets: ces propos généraux annoncent-ils que la Suisse n’examinera plus les demandes d’asile de Nigérians à l’avenir?»
«Cette manière de se focaliser sur le Nigeria m’a choqué.» Le propos, tout aussi outré, est signé… Yvan Perrin, vice-président de l’UDC Suisse. «L’ordre de grandeur de 99,5% cité par le directeur de l’ODM décrédibilise tout le reste du discours, qui est juste.» Pour le conseiller national, la sortie fracassante d’Alard du Bois-Reymond vise à montrer que sa cheffe, la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf, tient une ligne dure sur l’asile. Une tentative de donner des gages alors que le peuple votera en 2011 sur une initiative de l’UDC pour l’expulsion des criminels étrangers.
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