Paula est intégrée et travaille à Genève. Sa sœur jumelle réside aussi au bout du lac. Mariée, elle possède un permis, ce qui n’est pas le cas de Paula. La Suisse ne veut donc pas de cette Brésilienne, qui refuse d’être séparée de sa jumelle. Un article signé Eric Budry dans 24 Heures.
Paula n’a en fait qu’un tort, c’est celui de ne pas être originaire de l’un des pays de l’Union européenne. Cette Brésilienne de 33 ans parle parfaitement le français, elle n’a jamais eu de problème avec la justice et a travaillé comme aide soignante spécialisée dans un EMS, un secteur qui manque de bras. En dépit de cela, et malgré la demande de Genève, la Suisse ne veut pas d’elle.
«Il faut que les Suisses sachent comment cela se passe, s’exclame Pierre Amann. C’est tout simplement kafkaïen!» Celui qui se définit comme le grand-père adoptif de Paula et de sa sœur, Flavia, a remué ciel et terre pour obtenir un permis. Il a même écrit à la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf. En vain. Début janvier, la jeune fille sera convoquée à l’Office cantonal de la population (OCP) pour un entretien préparatoire en vue de son départ, près de dix ans après sa venue en Suisse. Sa sœur, elle, peut en revanche rester puisqu’elle détient le précieux sésame.
Pierre Amann, que Paula a soigné durant une longue convalescence, ne peut accepter cette issue. «Il y a bien sûr le fait que je ne peux me passer d’elle, mais ce n’est pas le plus important. Entre jumeaux, des liens très particuliers se nouent. On a l’impression qu’il n’y a qu’un seul cœur qui bat dans deux cœurs différents.»
Dans le même EMS
Flavia et Paula acquiescent. «Depuis notre naissance, nous avons toujours été ensemble. Si nous ne nous voyons pas un jour, nous nous téléphonons trois à quatre fois.» Les deux sœurs, qui ont une formation d’infirmière, travaillaient en fait dans le même EMS. Flavia possède un permis car elle est mariée à un employé d’ambassade. En avril 2008, l’employeur de Paula a sollicité un permis B pour elle.
Le 16 juin, elle reçoit effectivement de l’OCP une autorisation de séjour, mais un document, le permis Ci, qui n’est délivré qu’aux conjoints et aux enfants de diplomates et fonctionnaires internationaux.
«Honnête comme elle est, explique Pierre Amann, Paula a renvoyé son permis à l’OCP en lui indiquant son erreur. Résultat: quatre mois plus tard, elle recevait un courrier qui lui donnait quinze jours pour quitter le territoire.»
Deux refus de Berne
Bernard Ducrest, responsable de la direction séjour à l’OCP, ne commente pas cet épisode, mais il précise ce que le canton a fait. «Genève a préavisé favorablement une autorisation de séjour pour un cas de rigueur, détaille-t-il. Nous avons mis en avant l’attachement très fort avec sa sœur, mais l’autorité fédérale a refusé. Il est vrai que, comparativement à d’autres cas encore plus dramatiques, cet argument avait peu de chances d’être accepté. Une demande a ensuite été faite pour un permis sur le contingent de main-d’œuvre étrangère. Nouveau refus. Nous avons tout essayé, je ne vois malheureusement pas d’autre possibilité.»
On peut l’imaginer, ces explications ne satisfont ni Pierre Amann ni les deux sœurs. «Faut-il, pour éviter l’expulsion, qu’elle brûle son passeport brésilien, vende des drogues dures dans la rue et se prétende Palestinienne ou Irakienne?» conclut-il, abasourdi et indigné.
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