L'initiative populaire contre les minarets avait été déposée auprès du gouvernement, forte de près de 115 000 signatures, soit largement plus que le minimum des 100 000 nécessaires pour organiser une consultation. Débat récurrent en Suisse, l'idée d'interdire les minarets est soutenue par la droite populiste et les milieux évangélistes, qui joue habilement des sentiments xénophobes d'une partie de la population. Le Conseil national a bien dû se résoudre à organiser la votation, malgré les très nombreuses critiques que l'initiative avait suscitées, certains parlant d'un débat "ridicule, odieux et dangereux".
Dès le dépôt du texte, le gouvernement suisse avait fait savoir qu'il appellerait le peuple à le rejeter lors du vote. Le comité à l'origine de cette initiative a fait valoir que les minarets ne sont pas des constructions à caractère religieux mais "le symbole apparent d'une revendication politico-religieuse du pouvoir, qui remet en cause les droits fondamentaux".
Guerre d'affiches
Quoi qu'il en soit, la campagne en faveur du "oui" à l'initiative prend des tours malsains. L'UDC a ainsi imprimé une affiche représentant le drapeau de la Confédération avec une femme voilée et hérissé de minarets. Certaines villes ont interdit l'affiche, arguant de son caractère discriminatoire voire franchement haineux; mais d'autres, telle Genève, l'ont autorisée au regard du principe de liberté d'expression.
Une autre affiche, produite par un groupuscule valaisan, figurait les membres féminins du conseil des ministres revêtus d'une burqa à côté de leurs collègues masculins en costume classique, avec le slogan "Arrêtons de nous voiler la face". L'affiche a été interdite, l'image des "sept sages" (surnom du conseil des ministres de la confédération helvétique) ne pouvant être source d'une exploitation politique, selon la chancellerie fédérale.
Récemment, le comité des droits de l'homme de l'ONU s'était inquiété de l'initiative anti-minarets, jugée incompatible avec le Pacte international sur les droits civils et politiques. Pour l'un des membres de ce comité, Michael O'Flaherty, la publication des affiches présentant les musulmans sous un jour sinistre posait également problème. Dans sa réponse, le Conseil fédéral s'était dit "confiant que l'initiative sera rejetée par le peuple et que le problème de la compatibilité entre notre constitution et le droit international ne se pose que sur le plan théorique."
Malgré l'hostilité très nette de la plupart des partis politiques et des milieux économiques, religieux, sociaux, etc., le "oui" à l'interdiction continue à gagner du terrain, avec 35% de personnes favorables à l'interdiction.
Dans un pays qui compte, à l'heure actuelle, 4 minarets pour 200 mosquées.
T. Nagant avec Le Monde
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