mercredi 27 août 2008

SOS racisme à la dérive

Lire l'article du Courrier

DÉCONFITURE - Les conflits internes et les lacunes de gestion gangrenaient ACOR SOS Racisme depuis des années. Mais ses dirigeants ont tardé à réagir.
Il n'y a bientôt plus personne à bord. L'association ACOR SOS Racisme, à la dérive depuis plusieurs années, a vu ses principaux dirigeants quitter le navire ce printemps. Le coup de grâce a peut-être été donné au début du mois de juin, avec la décision du socialiste Oscar Tosato, municipal lausannois et membre fondateur de l'association, de se retirer du comité. Depuis la fin mai, ACOR SOS Racisme n'a plus aucun salarié, son secrétaire général, Karl Grünberg, ayant été licencié pour raisons économiques.

«Etat de déliquescence»

En mars dernier, Oscar Tosato avait déjà remis son mandat de président du comité, qu'il exerçait depuis quatre ans. Son successeur, socialiste lui aussi, n'aura pas eu autant de longévité: moins de trois mois après son entrée en fonction, Mazyar Yosefi envoyait sa lettre de démission, invoquant «l'état de déliquescence administratif d'ACOR SOS Racisme», une rupture de confiance avec Karl Grünberg et un manque de soutien du comité.
Dans la foulée, Jean-Michel Dolivo et Anne Papilloud, tous deux députés d'A gauche toute! au Grand Conseil, claquaient la porte à leur tour. Tout comme Oscar Tosato, ils réagissaient ainsi au refus de la majorité du comité de convoquer dans l'urgence une assemblée extraordinaire afin de faire le point de la situation.
Les causes de cette hémorragie? Depuis la fin de l'année 2005, ACOR SOS Racisme est plongée dans une profonde crise. Le principal élément déclencheur semble avoir été la suppression, à fin 2005, de la subvention fédérale de 100 000 francs qui était versée à l'association depuis cinq ans. Très rapidement, des conflits éclataient au sein de l'équipe, qui se cristallisaient autour de la personne de Karl Grünberg.


Des griefs identiques

Ces difficultés relationnelles, couplées aux soucis financiers, poussaient vers la porte les quatre autres salariés de l'association. On était alors à l'automne 2006. Peu de temps après, trois membres du comité démissionnaient. Les critiques fusaient contre Karl Grünberg: manque de professionnalisme dans la gestion, refus de toute remise en question, incapacité à travailler en équipe.
Un an et demi plus tard, les griefs formulés par certains des démissionnaires actuels font curieusement écho à ces reproches. «Karl Grünberg est brillant dans son domaine, mais c'est impossible de fonctionner avec lui, lâche Anne Papilloud. Dès qu'on n'est pas d'accord avec lui, il se braque. Il nie les problèmes.»
Des problèmes, il y en a pourtant à revendre. Une année et demie après la publication d'une bande dessinée contre le racisme, l'association doit toujours des dizaines de milliers de francs à l'imprimeur, au concepteur du projet et à certains dessinateurs (lire ci-dessous).


Subventions perdues

Le contexte politique n'est en outre pas le seul facteur dans la réduction des ressources financières d'ACOR SOS Racisme. En 2005, la subvention du canton de Vaud a certes été ramenée de 100 000 à 50 000 francs. Mais par la suite, l'association en a perdu encore un peu plus par sa négligence. En 2006, elle s'est vu priver de 20% de la manne vaudoise en raison d'importantes lacunes dans son rapport de gestion. «Pour 2008, la subvention à SOS Racisme était inscrite au budget, ajoute la coordinatrice cantonale à l'intégration, Magaly Hanselmann. Mais l'association n'a pas donné suite à nos démarches pour négocier une nouvelle convention.» Vaud a donc décidé de ne verser que la moitié de la somme.
Quant au canton de Genève, il n'a pas renouvelé cette année le contrat de prestation qui le liait, à hauteur de 100 000 francs, à SOS Racisme. «A une somme d'argent versée doit correspondre une certaine prestation, commente André Castella, délégué cantonal à l'intégration. Le bailleur doit en avoir pour son argent.» En proie à de grands doutes sur la question, le canton a donc commandé un audit. Ses conclusions devraient tomber dans une semaine. Contacté hier, Karl Grünberg n'a pas souhaité répondre à nos questions. «Je me suis engagé vis-à-vis de M. Castella à ne pas m'exprimer avant la fin de la procédure d'audit», explique-t-il.


Confiance aveugle?

Alors que les signaux d'alerte se multipliaient depuis des années, le comité de l'association semble avoir laissé la situation se dégrader. «Ce qui m'étonne le plus, c'est que le comité, malgré l'expérience politique de certains de ses membres, ait fait une confiance totale à une personne sans le moindre contrôle», lance Mazyar Yosefi. Oscar Tosato réfute cette accusation. L'ancien président met d'abord les difficultés de l'association sur le compte du contexte politique et de divergences idéologiques. «Karl Grünberg a-t-il commis des erreurs professionnelles? s'interroge Oscar Tosato. Dans toute entreprise, il y a des choses qui vont bien, et d'autres qu'il faut corriger

Aucun commentaire: