mardi 22 mai 2007

Xénophobie: Comment l'UDC dicte le rythme.

Lire l'article de Diidier Estoppey dans courrier
Christoph Blocher a beau avoir remporté, le 24 septembre dernier, une victoire censée régler le problème, la question des étrangers continue à dominer la campagne électorale. Face à une UDC passée maîtresse dans l'art d'imposer son agenda, la gauche peine toujours à trouver ses réponses.
L'image ne manquera pas de frapper les esprits: un drapeau suisse transpercé par un minaret. Dévoilée début mai, l'affiche vient en rappeler une autre tout aussi nauséabonde, placardée sur nos murs il y a cinq ans: celle représentant un homme basané déchirant le même drapeau en entrant par effraction dans l'emblème de la patrie. L'UDC militait alors pour son initiative combattant les abus en matière d'asile, rejetée de justesse le 24 novembre 2002.
Une défaite qui sonne aujourd'hui comme une victoire retentissante: l'UDC a obtenu, le 24 septembre dernier, pleine satisfaction avec deux lois sur l'asile et les étrangers qui vont bien plus loin que son initiative de 2002. Le parti blochérien s'en félicitait d'ailleurs, avant même le résultat de la votation référendaire, en saluant ces deux lois comme un «succès qui était encore impensable avant les dernières élections». Et saluait le succès d'un long travail politique entrepris en 1978, lorsque l'UDC déposait sa première intervention en matière de politique d'asile.
Mais l'UDC continue à avoir de la suite dans les idées. Au lendemain de ce fameux 24 septembre son porte-parole national, Roman S. Jäggi, annonçait que son parti n'allait pas se contenter de cette «victoire d'étape sur la voie de l'assainissement de la politique des étrangers». Et annonçait le menu des combats à venir: s'attaquer aux «nombre excessif de naturalisations», imposer nos «règles de vie en société» à des musulmans témoignant «quasi quotidiennement» de «divergences insurmontables» avec «notre mode de vie démocratique et chrétien». Et s'intéresser, évidemment, à ces «demandes de construire des minarets (qui) se multiplient comme les champignons après la pluie ces jours-ci»[1].


Des mycologues attentionnés


Les minarets, justement. Ceux qui font depuis peu l'objet de cette initiative dont feint aujourd'hui de s'émouvoir une partie du monde politique. Mais qui font, depuis l'automne dernier, l'objet d'une attention particulière des mycologues de l'UDC. Pas de quoi faire déborder leur panier: les projets de minarets qui semblent subitement, par leur volonté de domination, menacer la paix religieuse en Suisse sont au nombre de trois, à Wil (Saint-Gall), Wangen (Soleure) et Langenthal (Berne). Ils sont l'objet depuis de longs mois déjà de polémiques souvent alimentées par des élus locaux de l'UDC. Le 6 septembre, anticipant l'après-24, le parti tenait une réunion afin de «coordonner les efforts» de ces élus. Parmi les participants, un certain Roman S Jäggi, député soleurois, ainsi que le conseiller national zurichois Ulrich Schlüer, devenu depuis lors chef de file du comité d'initiative anti-minaret.
Deux précautions valant mieux qu'une, des élus udécistes déposaient parallèlement des interventions parlementaires visant à interdire les minarets à Zurich et au Tessin, quand bien même aucun nouveau projet concret n'existe dans ces cantons. Mais l'UDC reste bien sûr un parti démocratique: ce n'est qu'en juin, à l'issue de son assemblée des délégués, qu'on saura vraiment si elle soutient une initiative qui provoque quelques hésitations dans ses rangs. Le cas échéant, on viendra nous rappeler que l'UDC n'a rien contre les musulmans ni contre les mosquées, ne s'attaquant qu'à leurs excès.


Emeutes, censure et terrorisme

Ce n'est bien sûr que pur hasard si, en septembre dernier aussi, lors de la session de Flims, le groupe UDC, mêlant habilement affaire des caricatures danoises, conflit au Proche-Orient, émeutes dans les banlieues françaises et attentats terroristes musulmans, intervenait auprès du Conseil fédéral pour lui demander ce qu'il compte entreprendre «quant à la sauvegarde des valeurs fondamentales démocratiques et chrétiennes en Suisse». Et il serait évidemment malvenu de prêter aux caciques de l'UDC quelque influence que ce soit dans la surenchère à laquelle se livrent d'ores et déjà certains milieux d'extrême droite. A l'image des jeunesses identitaires de Genève, qui arborent fièrement ce nouveau slogan sur leur site: «Pas de minarets? PAS DE MOSQUEES!» I
Note : [1]Lire l'éditorial du 25 septembre 2006.
[2]Lire le communiqué de presse de l'UDC du 19 septembre 2006.

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