Comme de bien entendu, c'est en première page du Courrier que l'on trouve l'éditorial de Didier Estoppey.
«La Loi sur l'asile s'est transformée en une loi contre l'asile.» La formule est d'Amnesty International. Elle résume à merveille le sens d'une nouvelle loi à laquelle les Chambres fédérales ont donné hier, comme prévu, et à une nette majorité, leur approbation finale. Tout comme à celle sur les étrangers, qui procède de la même logique inhumaine: Amnesty l'a parfaitement compris en annonçant hier qu'elle s'associerait aussi au référendum contre cette loi, contrairement à la coalition d'ONG engagées dans le seul référendum contre la Loi sur l'asile.
Mais si la bataille démarre en ordre légèrement dispersé au plan national, il n'en va pas de même sur le terrain. Les comités référendaires qui se sont constitués dans différents cantons combattront les deux lois à l'unisson. Car là où partis, syndicats ou associations sont en contact direct avec les personnes concernées par ces lois iniques, on a compris le lien. Une même logique unit le racisme d'une loi présentant tout requérant comme un abuseur en puissance à une autre prétendant bannir du sol helvétique tout travailleur non européen.
Il est donc temps d'organiser la riposte. Ce week-end se tiennent à Berne les premiers états généraux de l'asile et de la migration en Suisse. L'occasion de commencer à compter et fédérer les forces vives susceptibles de faire barrage à la xénophobie qui menace d'inonder notre pays. Et à organiser les communautés de migrants qui devront continuer à sortir de l'ombre dans laquelle on entend les confiner. Pour montrer que celles et ceux auxquels s'attaquent ces lois ont un visage et des souffrances. Le durcissement de nos politiques sociales est largement alimenté par la méconnaissance de la pauvreté et de ces conséquences, écrivions-nous mercredi dans ce journal. Il en va de même concernant l'indifférence dans laquelle s'écrivent les violations des droits des migrants. Qui servent de laboratoire, faut-il le rappeler, à l'exclusion de franges de plus en plus larges de la population.
Mais c'est aussi politiquement qu'il faudra élargir le cercle pour donner à ces référendums une chance de triompher. Le combat ne doit pas rester confiné aux milieux proches de la gauche. Le centre-droite, qui prétend offrir une alternative à l'UDC et vient de faire à Berne la démonstration du contraire, a encore une petite chance de se démarquer. Le PDC genevois vient d'envoyer un premier signal en soutenant le double référendum. On se pince par contre en entendant la libérale Martine Brunschwig Graf fustiger les deux lois tout en dédaignant un référendum voué selon elle à l'échec (lire notre édition du 13 décembre).
Il n'est pas l'heure de sombrer dans le fatalisme. Les arguments ne manquent pas pour montrer le caractère absurde autant qu'inhumain de ces deux lois. Celle sur l'asile est ainsi nettement plus dure, sur de nombreux points, que l'initiative de l'UDC rejetée de justesse par le peuple en 2003. Il est temps, pour la droite prétendument libérale, de se ressaisir. Et de faire entendre sa voix parmi toutes celles qui sont convaincues qu'on ne construit pas de prospérité sur l'exclusion.
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