lundi 26 septembre 2005

Retour en Bosnie

Voici un courrier de lecteur paru dans 24heures:
J’ai honte!
Il est 5 heures et je n’ai pas fermé l’œil de la nuit. A chaque fois que je suis sur le point de trouver le sommeil, je revois ses grands yeux bleus et son regard désespéré.
Je l’ai rencontrée cet après-midi. Pour le jour de ses 20 ans, Berne lui a offert son plan de vol et, dans son désarroi, elle désirait trouver un peu de soutien et un dernier espoir. Elle n’a rien dit, ou presque; parfois juste un «oui» ou un «non» pour répondre à nos questions, communiquant souvent d’un simple regard gêné.
Mais son beau-frère qui l’héberge depuis cinq ans nous a raconté son enfance dans un village près de Srebrenica avec ses sœurs, l’horreur des massacres quand elle avait 10 ans, l’éclatement de la famille, la fuite à travers la forêt où régnait la «chasse à l’humain», la vie dans les grottes, les oncles massacrés, les père et mère disparus.
Pour finir, elle a été hébergée par une arrière-cousine dans un village voisin. En 2000, les «propriétaires» sont revenus et ont repris «leurs» maisons en chassant les «intrus». C’est alors seulement qu’elle a choisi de rejoindre ses sœurs réfugiées en Suisse. Un homme de loi a constitué un excellent dossier. Il a mis en évidence sa tentative de suicide, le fait qu’elle travaillait depuis peu en fabrique, ses traumatismes importants… Mais selon Berne on ne peut pas travailler avec de tels traumatismes, il y a donc erreur, le dossier est irrecevable. Renvoi. Punkt Schluss!
Et moi j’ai honte! Honte de ces magistrats qui décident sans cœur et sans logique, de ceux qui exécutent aveuglément, car «Berne a décidé», honte de ce pays qui perd ses valeurs et ne réussit même plus à offrir une toute petite place à une victime innocente de l’imbécillité humaine!


Pierre-André Cornaz, Yverdon-les-Bains

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