mardi 5 octobre 2010

Un tour de vis à deux vitesses

Eveline Widmer-Schlumpf plaide pour le retrait du droit de séjour des criminels étrangers. Pour la ministre, cela ne doit pas passer par l'initiative UDC mais par le contre-projet du parlement, tous deux soumis à votation le 28 novembre.

Le lancement de la campagne sur les votations du 28 novembre concernant l'expulsion des criminels étrangers a vu le retour à Berne de la conseillère d'Etat saint-galloise Karin Keller-Sutter (plr). Non pas pour défendre l'initiative de l'UDC, mais pour soutenir le contre-projet plus nuancé que les Chambres fédérales ont décidé de lui opposer. La candidate malheureuse au Conseil fédéral a lancé hier la campagne en compagnie de la cheffe du Département de justice et police Eveline Widmer-Schlumpf et de deux autres conseillers d'Etat, la Valaisanne Esther Waeber-Kalbermatten (ps) et le Jurassien Charles Juillard (pdc). Un choix de personnalités destiné à mettre en évidence l'isolement politique de l'UDC.Dès le 1er novembre, c'est la nouvelle conseillère fédérale socialiste Simonetta Sommuraga qui reprendra le flambeau. Elle aura affaire à une virulente campagne de l'UDC qui accuse ses détracteurs de faire la part belle aux violeurs.

Liste non exhaustive

L'initiative de l'UDC a pour but l'expulsion des étrangers reconnus coupables d'une liste non exhaustive de délits allant du meurtre à la simple effraction, voire à l'abus des prestations sociales. Ses adversaires dénoncent son manque de proportionnalité. «Un petit cambriolage entraînerait automatiquement l'expulsion de la Suisse, mais pas une escroquerie de grande envergure», souligne Eveline Widmer-Schlumpf.

Un contre-projet direct

L'initiative est cependant jugée suffisamment attrayante pour que le parlement ait pris la peine de lui opposer un contre-projet direct. Celui-ci prévoit lui aussi l'expulsion des délinquants étrangers, mais il met l'accent sur la gravité de l'infraction commise. Le renvoi serait prononcé si la personne a été condamnée à au moins un an de prison pour les délits contre la personne, 18 mois pour les escroqueries et deux ans de peines cumulatives pour les récidivistes.Le contre-projet est donc aussi dur que l'initiative à la différence près qu'il prévoit explicitement le respect du droit international et du principe de proportionnalité. Il introduit aussi des dispositions sur l'intégration. «C'est la meilleure façon de prévenir le basculement des étrangers dans la criminalité», affirme Charles Juillard. L'UDC a immédiatement organisé une contre-conférence de presse, hier, pour affirmer que ces réserves rendraient quasiment impossible le renvoi de criminels étrangers, bloqué par d'innombrables voies de recours. Selon Eveline Widmer-Schlumpf, les 400 expulsions annuelles que l'on connaît aujourd'hui passeraient à 800 avec le contre-projet et environ 1400 avec l'initiative.

Quatre possibilités de vote

La procédure de vote va demander de l'attention aux citoyens. Ils pourront voter deux fois «oui» ou deux fois «non» s'ils le souhaitent. Le cas échéant, une question subsidiaire permettra de départager les partisans d'un tour de vis.A gauche, un comité pour le double non s'est déjà constitué. Il condamne «la discrimination légale des étrangers et une justice d'exception». L'assemblée des délégués du Parti socialiste se prononcera fin octobre. Elle rejoindra probablement le camp du double non.

Christiane Imsand dans la Liberté

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