Septante-trois Erythréens ont agonisé et péri sur leur embarcation sans que personne ne vienne à leur secours. Un article d’Ariel F. Dumont dans 24 Heures.
Ils ne sont que cinq survivants. Leur témoignage est bouleversant. Pendant trois semaines, une embarcation avec, à son bord, 78 Erythréens a dérivé entre Malte, l’Italie et la Libye. Personne n’est venu à leur aide. Les candidats à l’immigration ont agonisé et péri dans l’indifférence.
«Au loin, nous avons aperçu à plusieurs reprises les feux de quelques bateaux, des grands et des petits, mais personne ne s’est arrêté pour nous aider. Nous avons attendu que quelqu’un nous tende la main, nous lance une échelle pour échapper à l’enfer. On nous a seulement donné un peu de pain, de nourriture et quelques bouteilles d’eau», raconte l’un des survivants.
La première à mourir avait 20 ans et «les yeux ouverts sur la mer qui l’a engloutie lorsque nous avons dû jeter son corps par-dessus bord», explique la seule femme à avoir survécu. Puis un autre et un autre encore. Au total, 73 personnes seraient mortes par manque de nourriture et, surtout, d’aide.
C’est d’ailleurs ce dernier point qui suscite une polémique sévère en Italie. Comment expliquer le fait, s’interrogent les secouristes à Lampedusa, qu’aucun bateau n’ait aperçu l’embarcation qui dansait à la dérive? «C’est comme si la peur prévalait sur le devoir de porter assistance en mer», a déjà répondu Laura Boldrini, porte-parole pour le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations Unies.
Dérive xénophobe
«L’Occident a fermé les yeux, personne n’a voulu voir le bateau des clandestins comme personne n’a voulu voir les wagons plombés remplis de Juifs par les nazis», a tonné Mgr Bruno Schettino, président de la Commission épiscopale pour les migrants. Tandis que les autorités italiennes tentent de récupérer les corps des 73 Erythréens jetés en pleine mer, à Rome, le ton se durcit. D’abord en raison des déclarations de la Ligue du Nord, le parti xénophobe et populiste qui prêche l’intolérance face aux immigrés. Tout en demandant l’ouverture d’une enquête, Roberto Maroni, membre de la Ligue du Nord, ministre de l’Intérieur et numéro 2 du parti, a laissé entendre que la version des cinq survivants pourrait être inexacte.
«Si les survivants ont dit la vérité, il va falloir se demander ce qu’il s’est passé», a déclaré, de son côté, Dario Franceschini, secrétaire du Parti démocrate.
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