Les ONG dénoncent les conditions de détention de Fahad Khammas
Paru le Mercredi 01 Avril 2009 dans le CourrierASILE - Amnesty International et l'Organisation mondiale contre la torture jugent inacceptable que le protagoniste de «La Forteresse» soit traité «comme un criminel».
Depuis six jours, il est enfermé en isolement dans la prison de l'aéroport de Zurich. «Comme s'il s'agissait d'un dangereux criminel», déplore Denise Graf, coordinatrice des réfugiés auprès de la section suisse d'Amnesty International. Pour Fahad Khammas, requérant irakien refoulé, les espoirs de retrouver un semblant de paix en Suisse tournent définitivement au cauchemar. A 25 ans, après un parcours juridique semblable à celui d'une balle de flipper, le jeune protagoniste du film La Forteresse est en passe de sombrer dans la déprime. «Son état de santé tant physique que mental se dégrade fortement», affirme Orlane Varesano, du secrétariat international de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT). Les deux ONG ont vertement protesté, hier, contre les conditions de détention du requérant d'asile débouté.
Quelle base juridique?
Placé dans une cellule minuscule, témoigne Denise Graf, Fahad Khammas a été «privé de sortie quotidienne en plein air et, entre autres, de l'usage de ses pantoufles». Le témoignage livré par l'OMCT a de quoi susciter une profonde inquiétude: «Il a cessé de se nourrir, il est extrêmement affaibli physiquement et présente des signes de profonds traumatismes psychologiques.» Vraisemblablement à l'origine de ces souffrances, les restrictions imposées au jeune Irakien par la direction de la prison ne semblent pas avoir de base juridique. «Jusqu'à aujourd'hui, aucun règlement ne nous a été montré, malgré nos demandes répétées», accuse Denise Graf. «Il n'a pas accès au téléphone et s'est vu limiter dans son droit à recevoir des visites», surenchérit Orlane Varesano. Des visites que le détenu reçoit derrière une épaisse paroi vitrée empêchant le contact physique.
Dans une lettre adressée à la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf, Amesty International détaille et dénonce ces violations. Elle est rejointe dans cette démarche par l'OMCT, qui «rappelle à la Suisse ses obligations internationales». Début mars 2009, cette organisation s'était déjà adressée en ces termes au secrétaire général de l'Office fédéral des migrations. Cette démarche est à ce jour restée lettre morte. Demain, le responsable de la prison de l'aéroport, Ernst Rohner, en déplacement hier tout la journée et donc injoignable, devrait rencontrer l'émissaire d'Amnesty International. «Nous attendons une clarification quant à l'utilisation disproportionnée des mesures de restriction, déclare Denise Graf. Jusqu'ici, on nous a laconiquement dit qu'elles étaient motivées par des raisons de sécurité. Mais ce jeune Irakien n'a jamais constitué et ne constitue un danger pour personne.»
Respect des standards ONU
De son côté, l'OMCT relève que, dans son rapport 2008, le groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a rappelé que «les immigrants clandestins placés en rétention administrative ne sont ni des criminels ni des suspects». Ce type de détention prévoit «des standards ad hoc», étaie Denise Graf. Ont-ils été respectés? Les deux ONG réclament une réponse à cette question.
Arrêté le 23 mars dernier, Fahad Khammas était à deux doigts d'être renvoyé en Suède, dernier pays où sa demande d'asile a été enregistrée. Mais son embarquement a été interrompu in extremis par une intervention fédérale. Dans le pays scandinave, il est «menacé de renvoi sur Bagdad, rappelle Denise Graf, où il a travaillé comme traducteur pour les forces américaines, raison pour laquelle il risque sa vie». Depuis le début du conflit, environ trois cents interprètes pour l'armée étasunienne ont été tués. Au moins autant ont fui le pays comme Fahad Khammas
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