lundi 20 avril 2009

Le plus grand camp de réfugiés du monde

Pendant que le monde se focalise sur les attaques de pirates, les Somaliens affrontent dans l’indifférence générale une gravissime crise humanitaire. Gustavo Kuhn dans 24 Heures.

A Dadaab au Kenya, des dizaines de milliers de Somaliens, qui ont fui la violence à Mogadiscio et ailleurs dans le pays, sont entassés dans des conditions déplorables. (AFP) Spectaculaires attaques, demandes de rançon… Les pirates du golfe d’Aden se sont invités à la une des médias internationaux. Du coup, les feux de l’actualité se sont à nouveau braqués sur la Somalie. Ou sur ses côtes plus exactement. Car ces bandes de brigands disposant d’armements et d’équipements sophistiqués cachent la terrible réalité dans laquelle est plongé ce pays. Une nation ravagée, et oubliée de tous, qui vit une des pires situations humanitaire et sécuritaire du monde. Guerre civile, famine, sécheresse et épidémies sont le pain quotidien des Somaliens depuis près de vingt ans.

Résultat: la violence et la faim jettent des dizaines de milliers de Somaliens sur les routes. Le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations Unies (HCR) vient de tirer le signal d’alarme concernant «l’afflux continu de Somaliens dans les camps surpeuplés de Dadaab», au Kenya. Situé à une centaine de kilomètres de la frontière entre les deux pays, ce complexe est considéré comme le plus grand camp de réfugiés du monde. Or la grande majorité de ses plus de 261 000 habitants sont des Somaliens.

Le pire est encore à venir

Certains sont là depuis le déclenchement de la guerre civile en 1991, mais «plus de 24 000 réfugiés somaliens ont fui vers le Kenya depuis janvier dernier», affirme le HCR. «La plupart des nouveaux arrivants évoquent une insécurité accrue, en plus de la sécheresse et des pénuries de nourriture, comme étant les principales raisons de leur fuite», explique l’organisme de l’ONU, qui peine à gérer ces nouvelles arrivées, car la capacité du camp est de 90 000 personnes. Le HCR ne dispose plus d’aucune terre où leur affecter un carré de terrain pour y vivre. Cela a entraîné une surpopulation, avec plus de 30 personnes vivant sur un carré de terrain de 12 mètres sur 13. Et nous craignons que la situation ne se détériore encore à l’arrivée de la saison des pluies, prévue en avril.»

Malnutrition et choléra

«La situation est dramatique», confirme Monica Rull à Médecins sans frontières (MSF), organisation présente dans un des camps de Dadaab. Les réfugiés ne manquent pas seulement de place, mais aussi d’eau. Et les conditions sanitaires sont très difficiles.» Pourtant, de nombreux Somaliens continuent de traverser clandestinement la frontière pour être hébergés dans ces camps. Car, malgré l’élection fin janvier d’un nouveau «président», la situation de la Somalie ne s’est pas améliorée.

Surtout pas au long des 30 kilomètres qui séparent Mogadiscio d’Afgooye. Un gigantesque camp de fortune y a en effet été improvisé, depuis 2006, par les habitants de la capitale qui fuyaient les combats opposant les milices des tribunaux islamiques aux forces du Gouvernement fédéral de transition appuyées par l’armée éthiopienne.

«Plus de 300 000 personnes y vivent, affirme Monica Rull. C’est le plus grand camp de déplacés du monde. Et les conditions de vie y sont terribles. Chaque mois, nos équipes traitent plus de 3000 enfants souffrant de malnutrition sévère. Les cas de diarrhée aiguë sont en augmentation. Et nous sommes désormais en alerte face au choléra.»

GUSTAVO KUHN

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