samedi 3 mai 2008

Berne promet des accords de renvoi

Les fameux accords de réadmission qui permettent d’expulser des migrants devenus indésirables restent très difficiles à négocier. Un article signé Cédric Waelti dans 24 Heures.

A Genève, le quai Gusta­ve-Addor est prisé. Par les mamans avec pous­settes le jour. Et par les ama­teurs de cannabis ou de «pou­dre » le soir. Excédé, le conseiller d’Etat socialiste Laurent Mouti­not promet d’ouvrir la chasse aux clients. Pour le reste, le responsable de la police gene­voise déplore le fait que nombre de trafiquants d’origine étran­gère, sans identité connue, ne soient pas refoulables. Dans une interview publiée dans Le Matin Dimanche, il incitait récemment Berne à conclure davantage d’ac­cords de renvoi avec les «pays d’Afrique du Nord». Rappelons que la signature de ces traités (bilatéraux ou multilatéraux) est souvent un préalable indispen­sable à l’expulsion. Car nombre de pays refusent d’accueillir leurs expatriés si ceux-ci ne peu­vent pas apporter la preuve de leur nationalité. Par ailleurs, d’autres Etats ne tolèrent pas les renvois sous la contrainte.
42 accords signés
A ce jour, la Suisse a paraphé 42 accords de renvoi. C’est peu et le compteur défile lentement. En outre, ces engagements ne concernent qu’une partie des flux migratoires vers notre pays. Ainsi, si le Conseil fédéral a trouvé un terrain d’entente avec les pays de l’ex-Yougoslavie, et plusieurs anciennes Républi­ques de l’Est, les pays africains rechignent à s’engager sur cette voie.
Les raisons tiennent d’abord au poids économique des émi­grés qui transfèrent une bonne partie de leurs revenus vers leur pays d’origine. En 2006, le Fonds international de développement agricole avait calculé que ces montants étaient de 300 mil­liards de dollars, soit trois fois le montant de l’aide mondiale pu­blique au développement.
Autre problème, qui découle de ce constat, les pays africains sont les premiers à demander, en échange d’un accord, un ac­cès privilégié au marché du tra­vail suisse. En clair, ils souhai­tent davantage de visas pour leurs ressortissants et la fixation d’un quota. Une requête jugée inacceptable pour les autorités, qui négocient uniquement sur une base qualitative. «En assou­plissant les conditions d’octroi des visas», explique Jonas Mon­tani, porte-parole de l’Office fé­déral des migrations (ODM).
Aide au retour négociée
Pour inciter les pays africains à signer des accords, l’ODM uti­lise donc principalement le le­vier de l’aide au retour qui com­porte plusieurs volets. Outre un forfait individuel versé au mi­grant (quelques milliers de francs au mieux), des aides structurelles sont mises en place dans les pays. Comme des cours sur les dangers de l’immigration illégale par exemple. Enfin, il existe un dernier type de soutien possible. «Nous finançons aussi des projets concrets qui permet­tent la réinsertion du migrant dans l’économie locale», ajoute Jonas Montani. Cela peut être l’ouverture d’un commerce.
Toutefois, malgré la volonté d’Eveline Widmer-Schlumpf de poursuivre sur le chemin des accords de réadmission (lire no­tre édition d’hier), les négocia­tions restent difficiles. Le cas des Etats du Maghreb est embléma­tique. La mise en place d’accords dans cette région (avec pro­gramme d’aide au retour) est l’un des objectifs pour l’année 2008. Ce qui était déjà le cas en… 2003. Dans une réponse à une motion au National, le Conseil fédéral déclarait que «le Maghreb et l’Afrique occiden­tale » étaient des priorités. Pour justifier la lenteur des négocia­tions, le gouvernement mettait en avant «de profondes diver­gences en matière d’intérêts compensatoires». Des divergen­ces qui, visiblement, perdurent. «Nous sommes en pourparlers avec le Maroc depuis trois ans, confirme Jonas Montani. Mais nous avons aussi entamé un rapprochement avec la Libye et l’Egypte.» Un accord a égale­ment été signé avec l’Algérie, même si les modalités restent à définir. En ce qui concerne l’Afri­que subsaharienne, seuls le Ni­geria, la Namibie et le Congo ont donné des garanties.

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