mardi 22 avril 2008

Santé et sans-papiers un rapport d'un étudiant de l'IDHEAP

L'Institut des Hautes Etudes en Administration Publique de Lausanne vient de terminer une étude sur la santé des sans-papiers.

L'étude complète (47 pages) est disponible à l'adresse suivante:

En voici juste les conclusions

6. Conclusions
Les études montrent que les sans-papiers représentent en Suisse, à l’image du reste de l’Europe, une importante population et que l’accès de cette population au système de soins est défavorisé, au risque de prétériter leur santé.
La politique fédérale en termes de santé et migration est fédérée par la Stratégie Migration et Santé 2002-2006 et propose un catalogue de mesures, dont la mise en oeuvre est le plus souvent déléguée à des organismes tiers (cantons, privés). La question de l’accès aux soins des sans-papiers n’y est pas traitée explicitement.
La problématique étudiée dans le cadre de ce travail mêle étroitement gestion économique et financière, santé, droits de l’Homme et égalité des chances dans un environnement législatif contradictoire, illustrant la tension entre les impératifs de santé publique et les contraintes de la politique d’immigration.
A cet égard, cette situation schizophrénique explique que les politiques en faveur de la santé des sanspapiers sont issues d’initiatives privées et caritatives. La non reconnaissance du problème social par les autorités politiques implique une dynamique bottom-up. Le mouvement top-down reste discret, pour ne pas choquer la réglementation sur l’asile et les étrangers, et trouve sa légitimité dans l’obligation morale de respecter les droits de l’homme.
Dans les cantons de Vaud et de Neuchâtel les dispositifs de soins aux sans-papiers étudiés, font appel à du bénévolat et des fonds privés. Ils sont pour l’heure diversement soutenus financièrement par les pouvoirs publics. Bien que le canton de Vaud intègre tacitement le PEL à son réseau de santé en charge des populations vulnérables en général, et des sans-papiers en particulier, il ne participe pas pour autant à son budget. La subvention cantonale du RMS provient, elle, du budget général de la santé publique.
Nous avons ainsi constaté que si les différents acteurs privés et publics collaboraient effectivement sur le terrain, il manquait souvent une politique publique explicite quant à la reconnaissance des dispositifs et qu’aucune réglementation ne légitimait de fait les dispositifs en place et leur intégration à une quelconque politique publique.
On peut penser que la situation légale évoquée précédemment incite les Conseils d’Etat à une certaine prudence et que leur action publique en la matière est essentiellement pragmatique, sous la forme de soutiens financiers à des institutions en place. Il en ressort l’impression que la politique effective en matière de santé des sans-papiers est avant tout privée.
Il n’est pas certain qu’en l’absence des acteurs privés, ces dispositifs auraient pu prendre un tel essor. Il est douteux que ceux-ci puissent s’inscrire à moyen terme de manière pérenne dans les politiques cantonales, faute de base légale déterminante d’acceptabilité sociale de la présence d’une migration illégale.
Dans nos différentes propositions, nous nous sommes avant tout attachés à trouver des sources de financement, étant entendu que toute politique publique passe par son financement.
La question d’une prise en charge quelconque des populations étrangères en général et sans-papiers en particulier est potentiellement sujette à une exploitation politique (xénophobie, racisme, sentiment d’injustice de la part des populations suisse et résidentes par rapport à une prise en charge paraissant trop large et dont ils seraient exclus, etc.), c’est pourquoi nous avons cherché des sources de financement qui mettent à contribution les bénéficiaires eux-mêmes.
La LAMal est longtemps apparue comme une solution pour garantir l’accès aux soins pour les sans-papiers.
Il s’avère, selon notre étude, que ce mécanisme de solidarité entre biens portants et malades est mal adapté à une population paupérisée, dans l’illégalité et socialement en marge des mécanismes usuels de notre société, et ne permet pas, à lui seul, de financer une politique publique.
Une des limites de la LAMal est liée aux problèmes de financement des primes, des franchises et des quotesparts de la part de la population concernée.
Dans un premier scénario, nous proposons de baser le financement des soins de santé aux sanspapiers sur une institution tierce, garante à la fois des paiements et de l’anonymat des sans-papiers.
Cette proposition propose que l’accès aux soins des sans-papier soit prise en charge par le système de santé classique.
Hors administration, l’institution serait garante de l’anonymat des sans-papiers et devrait pouvoir les affilier sur la base de sa propre adresse et faire ainsi le pont entre les caisses d’assurance et les sanspapiers.

Cette solution devrait être subventionnée par les pouvoirs publics, de manière à pouvoir pallier les défauts de paiement de la part des sans-papiers, l’institution étant habilitée à récupérer les sommes dues auprès des bénéficiaires.
Dans un deuxième scénario, nous proposons de financer un réseau de santé parallèle dédié aux soins de premier niveau des sans-papiers, par l’intermédiaire d’une mutuelle que les bénéficiaires financeraient partiellement eux-mêmes, le solde étant à la charge des pouvoirs publics.
Un système de réassurance auprès des assureurs maladie permettrait de financer les cas devant être pris en charge par le système de santé classique.
Les expérience des dispositifs acquises dans le développement de compétences transculturelles et de méthodes de gatekeeping incitent à institutionnaliser la voie qu’ils ouvrent, de sorte à élargir et garantir à long terme leur existence. Cette institutionnalisation nous semble nécessaire pour la reconnaissance de la migration comme un problème de société, afin de dépasser l’équation simpliste du clandestinabuseur.
La migration illégale, l’accès aux soins de ces populations vulnérables posent un problème de
civilisation.

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