«Aujourd'hui, explique Adem Salihi,
il est facile de juger mon attitude.
Mais ce que j'ai fait, c'était pour sauver ma famille
dans un pays qui venait de sortir de la guerre.»
Drôle de rebondissement la semaine dernière dans le dossier d'Adem Salihi. Philippe Leuba, le nouveau conseiller d'Etat, révélait que le requérant débouté avait bénéficié en 2000 d'une aide au retour (2000 deutsche Mark, soit 1600 fr.) de la Suisse. Pour le libéral fraîchement élu, cela signifiait que le Kosovar de 42 ans était désormais indéfendable, car il avait trahi un accord passé avec la Suisse en revenant clandestinement dans le pays.
Alors qu'à Bassins (VD) les habitants continuent à fortement soutenir leur «chouchou», l'ancien employé de la commune se dit attaqué dans son honneur. Adem tient absolument à ce que tout le monde sache qu'il est honnête. Avec l'aide de son comité de soutien, il livre sa version des faits.
Vous reconnaissez donc avoir touché les 2000 DM en janvier 2000?
Oui. A l'époque, ma maison avait brûlé et tout mon village était détruit. C'était la guerre. Après des recherches, j'ai appris que ma famille avait fui. J'ai dû repartir au Kosovo pour aller chercher ma femme et ma fille qui s'étaient réfugiées dans un camp en Turquie et mes trois autres enfants en Macédoine.
Et donc vous aviez besoin d'argent?
Oui, pour les faire revenir. C'est la Croix-Rouge qui m'a donné cet argent à Pristina, et personne ne m'a jamais dit que ça venait de la Suisse et que je ne pourrais plus revenir. J'ai pensé qu'il s'agissait d'une aide humanitaire. Aujourd'hui, je regrette d'avoir accepté cet argent. Pour prouver ma bonne foi, je suis prêt à tout rembourser, même le double, s'il le faut, si cela peut me permettre de rester en Suisse. Je suis quelqu'un d'honnête et de travailleur.
Pourquoi avez-vous décidé de revenir clandestinement en Suisse?
Ma famille était à nouveau réunie. Mais impossible de trouver un travail. J'étais pourtant prêt à tout accepter. Alors, j'ai laissé le peu d'argent qui restait à ma femme et je suis revenu. D'ici, je pouvais envoyer à ma famille un peu d'argent. Pour moi, c'était la seule façon de les faire vivre modestement.
Vous ne pensez donc pas avoir trahi la Suisse?
Non! Aujourd'hui, il est facile de juger mon attitude. Mais ce que j'ai fait c'était pour sauver ma famille dans un pays qui venait de sortir de la guerre. Difficile dans une situation pareille de garder son sang-froid et de prendre le temps de se demander d'où venaient les deutsche mark. Je n'ai jamais voulu trahir la Suisse.
Une attente insoutenable |
Aujourd'hui, Adem ne travaille plus comme jardinier à la commune. Il continue cependant à rendre des petits services aux habitants de Bassins. Il vit dans l'angoisse de recevoir une convocation au Service de la population qui lui proposera, selon la promesse de Philippe Leuba, une nouvelle aide au retour et qui lui fixera une date de renvoi. Adem a décidé de maintenir son recours contre ce renvoi en se basant sur de nouveaux éléments. Il se dit gravement malade et rappelle que son épouse a décidé de demander le divorce. |
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