mercredi 25 juillet 2007

Adem Salihi

Le dossier d'Adem Salihi, l'ancien employé communal de Bassins (VD), ne sera pas transmis à Berne pour une demande de régularisation. Le conseiller d'Etat Philippe Leuba refuse de susciter de faux espoirs auprès du clandestin.

http://www.24heures.ch/var/plain/storage/images/contenus/editorial/articles/a_vaud/au_bout_du_rouleau_adem_a_pose_ses_outils/4132999-1-eng-GB/au_bout_du_rouleau_adem_a_pose_ses_outils_resize480.jpg

[ats] - "Cette demande de régularisation n'a pas l'ombre d'une chance de succès" a expliqué à l'ATS Philippe Leuba. "J'ai décidé de ne pas renvoyer son dossier à Berne après une longue instruction. J'en suis le premier désolé. J'avais dit que s'il y avait une petite ouverture, je la saisirais", a ajouté le conseiller d'Etat.
Avant de prendre sa décision, le nouveau conseiller d'Etat - entré en fonction en juillet - a demandé à "connaître précisément" la pratique de l'Office fédéral des migrations (ODM) et la jurisprudence en la matière du Tribunal fédéral. Il a également reçu "tous ceux qui me l'ont demandé", explique-t-il.
Mais un nouvel élément est apparu lors de l'étude du dossier. "A la fin de la semaine dernière, nous avons appris qu'en l'an 2000, lorsqu'il est rentré au Kosovo, Adem Salihi a obtenu une aide au retour, d'environ 2400 DM", a expliqué M. Leuba. Et quelques semaines plus tard, il est revenu clandestinement en Suisse.
"A peine a-t-il touché l'aide au retour qu'il est revenu. Et il savait qu'il n'obtiendrait pas l'asile, car sa demande avait été rejetée début 1997, trois mois après sa demande. Comment avoir une chance de défendre un tel dossier à Berne", se demande M. Leuba.
Le chef du Département de l'intérieur reconnaît que le clandestin est bien intégré. Mais il rappelle que l'intéressé a une famille au Kosovo à laquelle il envoie chaque mois de l'argent.
Même si sa femme a demandé le divorce, l'intéressé conserve des obligations envers ses quatre enfants. Il doit assumer sa paternité pas seulement sur le plan financier. "Le Tribunal fédéral l'a dit dans un cas similaire", relève Philippe Leuba.
L'ancien employé communal de Bassins peut faire recours contre cette décision au Tribunal administratif. Si cette instance confirme la décision du conseiller d'Etat, Adem Salihi sera convié au Service cantonal de la population pour organiser son départ.

Pour terminer, ce commentaire de François Modoux dans le journal Le Temps :

Triste, mais responsable
Personne ne peut reprocher à Adem Salihi d'avoir tout tenté pour se construire une vie meilleure en Suisse. D'abord comme saisonnier, puis comme requérant d'asile, enfin comme clandestin. En se précipitant en Suisse aussitôt après avoir touché l'aide suisse au retour dans son pays, il y a sept ans, le jeune homme n'a pas commis un crime. Ce geste maladroit, bien sûr un peu décevant, dit la folle détermination du jeune homme à vouloir faire sa vie dans cet îlot de prospérité qu'est la Suisse.

Mais les faits sont têtus. Le Kosovar a beau avoir prouvé sa capacité à s'intégrer, il n'a à aucun moment satisfait aux multiples conditions extrêmement restrictives du droit d'asile ou du droit des étrangers. Sans compétence pour prendre la décision ultime, l'administration vaudoise et le conseiller d'Etat Philippe Leuba ont étudié le dossier avec rigueur et probité. C'est clair, ni l'un ni l'autre ne sont en campagne pour assouplir la législation. Mais peut-on leur reprocher leur choix de ne pas vouloir éveiller de faux espoirs? Peut-on leur reprocher de prendre leur responsabilité alors qu'ils ont des raisons objectives de penser que la régularisation est inatteignable?

C'est triste à constater: en l'état du droit et de son application, Adem Salihi aurait gagné à rester en tout discrétion l'employé clandestin de la petite commune de Bassins. Un sans papiers parmi les milliers qui font tourner l'économie suisse en surchauffe.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

La conclusion de cette histoire, c'est les grandes eaux dans les moulins de la droite dure, ils vont pouvoir crier au loup: "Les étrangers sont tous des profiteurs!". A force de cadenasser la Suisse derrière des frontières blindées à grands coups de lois hermétiques, on ne fait que renforcer son attractivité: de l'extérieur on doit s'imaginer un paradis défendu. Tu parles d'une désillusion, quand tu te retrouves dans le dédale d'une administration kafkaïenne et que finalement personne ne veut de toi, sauf si tu acceptes de te laisser esclavagiser. Adem aura le mérite de la ténacité.

Anonyme a dit…

L'administration n'est pas kafkaïenne, elle a en effet un message clair qui ne laisse présager aucune autre interprétation.

De plus, avec la nouvelle loi sur le travail au noir, il n'y aura plus place pour l'exploitation de ces personnes démunies face à des promesses de passeurs mafieux.

Par contre, les divers comités de soutien frisent parfois une naïveté indéfendable.

Anonyme a dit…

"Promesses de passeurs mafieux"? Ça sort d'où ça?

Dans cette histoire, les politiques exploitent une minuscule faille dans le dossier pour s'en sortir à bon compte. "Adem a bénéficié de 2'000 francs d'aide au retour, c'est donc bien un profiteur pour lequel on ne peut rien faire..." Plutôt petit comme porte de sortie!

2'000 balles, la belle affaire quand on sait tout ce que les travailleurs sans-papiers "au gris" amènent à notre économie, cotisent en assurances sociales et paient en impôt à la source.

Ceci dit, si la nouvelle loi interdit le travail au noir, je conseille vivement aux Suisses de se remettre rapidement à la maçonnerie, à la garde des enfants, au ménage, à la restauration...

Je rappelle que le vrai appel d'air pour les immigrants, ce n'est pas une loi favorable ou des régularisations massives (type Espagne), mais l'offre de travail peu qualifié, contre laquelle la loi sur le travail au noir ne va strictement rien changer. Ceux qui croient que cette loi va changer la donne font preuve d'une "naïveté indéfendable".