Il faut d’emblée se poser la question: a-t-on déjà vu un député retirer une motion aujourd’hui transformée en décret accepté par la majorité absolue du Grand Conseil - avant que son texte ait pleinement atteint son but et rempli sa mission? Non, ce serait là faire preuve au mieux d’inconséquence, au pire de manque de respect vis-à-vis de ceux qui l’ont voté.
Le décret qui porte mon nom garde, j’allais dire malheureusement, toute son utilité, car la saga des 523 n’est pas encore terminée, n’en déplaise à mon contradicteur qui persiste à voir dans ces problèmes humains un prétendu clivage gauche-droite.
Certes, et nous en savons gré au Conseil d’Etat, quelques dizaines de requérants déboutés ont obtenu une autorisation de séjour, mais il en reste des dizaines d’autres dont le sort n’est pas encore réglé. On peut d’ailleurs se demander, en passant, comment des dossiers réputés indéfendables durant des années, ont tout d’un coup été jugés recevables!
Certes, le Conseil d’Etat, et nous ne doutons pas de sa sincérité, va faire tout son possible pour obtenir un maximum de régularisations, notamment pour les 175 Ethiopiens et Erythréens, dont personne n’imagine le renvoi sous contrainte, tant ces gens sont intégrés chez nous, alors qu’ils risquent gros en rentrant dans leur pays, encore fortement troublé! Mais il emploie le futur dans son communiqué: «le Conseil d’Etat veillera à obtenir le plus rapidement possible un traitement positif ». Lorsqu’il s’exprimera au passé et pourra dire «a veillé», alors il sera temps pour nous de demander l’abrogation du décret, devenu inutile.
Mais avec 146 personnes en procédure de recours, 175 ressortissants dont on vient de parler et 16 requérants sacrifiés pour sauver l’honneur – à moins que cela soit simplement la part du dieu Moloch - cela fait encore une grande partie des 523! Comment peut-on dire que le décret Melly est devenu sans objet quand plus de la moitié des personnes concernées vit encore sur le qui-vive!
Car, et il s’agit de le rappeler haut et fort, alors que la défense des étrangers n’est de loin pas un sujet populaire, la majorité du peuple vaudois a pris fait et cause pour ces requérants déboutés, établis chez nous depuis des lustres, quasiment tous intégrés et engagés professionnellement. Et si nous sommes intervenus dans ce débat, c’est bien pour dire stop à cette affaire ridicule, à cet acharnement sur des personnes qui contribuent à la vie économique du canton, alors que dealers et malfrats sont à peine inquiétés. Pour dire que le canton, Conseil d’Etat en tête, avait d’autres chats à fouetter! Au risque d’en faire un «delenda est Carthago» énervant, nous l’avons sans cesse répété: quitte à être désormais plus stricts, tirons un trait sur le passé! Or ce trait n’est qu’à moitié tiré; quel gâchis ce serait de vouloir arracher au forceps une décision de renoncer à ce décret, alors qu’il tombera comme un fruit mûr lorsque la grande majorité de ces cas douloureux seront réglés.
Depuis les négociations de Berne, la situation sur le plan de l’asile est quasi-sereine dans notre canton: vouloir brusquer une décision, alors que la situation se décante, c’est mettre les défenseurs de l’asile sur les pattes arrières, c’est prendre le risque de mettre le feu aux poudres, c’est créer une affaire 523 bis!
Sans le décret Melly, jamais le Conseil d’Etat n’aurait sollicité une nouvelle négociation à Berne. Il reste un puissant moyen de pression pour dire au gouvernement de ne pas s’arrêter au milieu du gué, de ne pas jeter prématurément les outils avant que le travail soit complètement terminé
Serge Melly, député radical
Fin de l’affaire des «523», le décret Melly n’a plus sa raison d’être
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