Dans la rubrique "Réflexions" du 24 Heures, Jacques Poget, rédacteur en chef, nous livre les siennes sur le mariage des artistes et de la politique sous le titre: "Mais oui, ça fait du bien que les artistes s’engagent politiquement!"
Jacques Poget: «L’intervention des artistes concourt à la formation de l’opinion.
Pas un mot d’ordre mais une invite à la réflexion, et l’exemple du courage»
Mais de quoi se mêlent-ils donc, ces artistes qui nous appellent un jour à condamner l’agression israélienne au Liban et le lendemain à voter contre les lois sur l’asile et les étrangers? En quoi leur état leur donne-t-il compétence et autorité pour se prononcer sur les affaires de la collectivité? Qu’un chanteur chante, qu’un cinéaste tourne, qu’un romancier écrive - leur public les attend sur leur terrain, la société n’a que faire de leurs avis. Prétention d’autant plus inconséquente que la plupart dépendent, au moins indirectement, de subventions de l’Etat… le devoir de réserve s’impose!
Vraiment? Et pourquoi donc les créateurs n’auraient-ils pas le droit de se préoccuper de l’intérêt général, et d’exprimer leur opinion en se définissant comme ils l’entendent?
La question n’est pas neuve de Zola à Sardou, de Sartre et Camus à Moretti et Tabucchi, de Brasillach à Bruce Springsteen, et bien avant eux, il s’est toujours trouvé des artistes pour mettre leur talent et leur prestige au service de leurs idées politiques. Pour estimer que leur responsabilité citoyenne exigeait qu’ils s’engagent publiquement. Pour trouver légitime de s’exprimer non dans l’anonymat artificiel de pseudo-citoyens lambda qu’ils ne sont pas, mais en tant que personnes réelles, avec toutes leurs qualités.
L’appel de Locarno offre un bon exemple de prise de risque: le texte réclame non seulement un cessez-le-feu immédiat (mesure équilibrée) mais aussi la fin de «l’expansionnisme militaire » d’Israël. Aussitôt taxée d’antisémitisme - de façon abusive - cette proclamation expose ses signataires à toutes sortes de critiques et peut-être de difficultés dans leur métier. Risque qu’ils encourent consciemment, on leur reconnaîtra le courage de leurs opinions.
Et l’asile, et les étrangers? Ces deux lois, votées par le Parlement, sont attaquées en référendum, et le peuple aura le dernier mot. Rien de plus démocratique - et c’est pourquoi il est précieux que les artistes se fassent entendre dans le débat en cours avant la votation du 24 septembre.
Ils prouvent par l’acte qu’ils ne se considèrent pas comme des êtres à part, évoluant dans des sphères éthérées. Si ces créateurs ont leur public, celuici est intéressé à savoir ce qu’ils pensent en tant que citoyens, et à constater qu’ils ne sont pas préoccupés que de leur oeuvre, de son succès et de leurs royalties. A ceux qui se reconnaissent dans leur monde intérieur, ces artistes disent leur vision d’un problème qu’ils jugent grave. Leur intervention concourt à la formation de l’opinion. Pas un mot d’ordre, mais une invite à la réflexion. Un exemple? Oui, celui du courage. Pas question, bien sûr, d’exiger de tout artiste qu’il s’engage et donne son avis sur tout: libre à chacun de vivre sa vie comme il l’entend. Mais pas question non plus d’interdire à quiconque de participer, fût-ce en mettant sa notoriété au service de ses idées. En particulier sous prétexte que de l’argent public lui permet detravailler; une subvention au film, au livre, au théâtre a pour but de favoriser la création, non d’acheter le silence ou la docilité du créateur. Si les appels des milieux artistiques sont unilatéraux, on ne saurait le reprocher à personne. Ni à ceux qui s’expriment - ils sont sincères - ni à ceux qui estiment que l’engagement public n’est pas leur rôle.
Ce sont de mauvais procès, et seul compte en définitive l’examen de conscience du citoyen devant ces appels, et son choix personnel. Pour ou contre? Peu importe: la démocratie ne redoute qu’une chose, l’indifférence.
Vraiment? Et pourquoi donc les créateurs n’auraient-ils pas le droit de se préoccuper de l’intérêt général, et d’exprimer leur opinion en se définissant comme ils l’entendent?
La question n’est pas neuve de Zola à Sardou, de Sartre et Camus à Moretti et Tabucchi, de Brasillach à Bruce Springsteen, et bien avant eux, il s’est toujours trouvé des artistes pour mettre leur talent et leur prestige au service de leurs idées politiques. Pour estimer que leur responsabilité citoyenne exigeait qu’ils s’engagent publiquement. Pour trouver légitime de s’exprimer non dans l’anonymat artificiel de pseudo-citoyens lambda qu’ils ne sont pas, mais en tant que personnes réelles, avec toutes leurs qualités.
L’appel de Locarno offre un bon exemple de prise de risque: le texte réclame non seulement un cessez-le-feu immédiat (mesure équilibrée) mais aussi la fin de «l’expansionnisme militaire » d’Israël. Aussitôt taxée d’antisémitisme - de façon abusive - cette proclamation expose ses signataires à toutes sortes de critiques et peut-être de difficultés dans leur métier. Risque qu’ils encourent consciemment, on leur reconnaîtra le courage de leurs opinions.
Et l’asile, et les étrangers? Ces deux lois, votées par le Parlement, sont attaquées en référendum, et le peuple aura le dernier mot. Rien de plus démocratique - et c’est pourquoi il est précieux que les artistes se fassent entendre dans le débat en cours avant la votation du 24 septembre.
Ils prouvent par l’acte qu’ils ne se considèrent pas comme des êtres à part, évoluant dans des sphères éthérées. Si ces créateurs ont leur public, celuici est intéressé à savoir ce qu’ils pensent en tant que citoyens, et à constater qu’ils ne sont pas préoccupés que de leur oeuvre, de son succès et de leurs royalties. A ceux qui se reconnaissent dans leur monde intérieur, ces artistes disent leur vision d’un problème qu’ils jugent grave. Leur intervention concourt à la formation de l’opinion. Pas un mot d’ordre, mais une invite à la réflexion. Un exemple? Oui, celui du courage. Pas question, bien sûr, d’exiger de tout artiste qu’il s’engage et donne son avis sur tout: libre à chacun de vivre sa vie comme il l’entend. Mais pas question non plus d’interdire à quiconque de participer, fût-ce en mettant sa notoriété au service de ses idées. En particulier sous prétexte que de l’argent public lui permet detravailler; une subvention au film, au livre, au théâtre a pour but de favoriser la création, non d’acheter le silence ou la docilité du créateur. Si les appels des milieux artistiques sont unilatéraux, on ne saurait le reprocher à personne. Ni à ceux qui s’expriment - ils sont sincères - ni à ceux qui estiment que l’engagement public n’est pas leur rôle.
Ce sont de mauvais procès, et seul compte en définitive l’examen de conscience du citoyen devant ces appels, et son choix personnel. Pour ou contre? Peu importe: la démocratie ne redoute qu’une chose, l’indifférence.
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