vendredi 2 juin 2006
Jacques Neirynck: "c'est une loi nazie !"
Lire dans la Liberté
Lire l'interview réalisée par Michael Rodriguez
Jacques Neirynck juge que le PDC a fait une erreur politique en soutenant les lois sur l'asile et les étrangers. Il évoque aussi les visées de son parti au Conseil d'Etat.
Parmi les personnalités politiques qui donnaient mercredi le coup d'envoi à la campagne du comité vaudois contre les lois fédérales sur l'asile et les étrangers, il était le seul à ne pas être de gauche. Mais l'ancien conseiller national Jacques Neirynck n'en a cure. Président d'honneur d'un PDC vaudois minuscule, cet écrivain et professeur honoraire de l'EPFL sait ce qu'être minoritaire veut dire. La section vaudoise de son parti est, avec ses cousines genevoise, neuchâteloise et jurassienne, l'une des rares à prôner le «non» au durcissement de la politique d'asile et d'immigration. Entretien avec un homme qui verrait bien le PDC relever, au Conseil d'Etat vaudois, les défis démographiques et énergétiques actuels.
Qu'est-ce qui motive votre engagement contre les lois sur l'asile et les étrangers?
Jacques Neirynck: - Des tas de raisons humanitaires, mais aussi des raisons «pratiques». La loi sur les étrangers de 1931 était passablement dure: elle a quand même permis d'envoyer 15 000 juifs à la mort durant la Seconde Guerre mondiale. Et on la renforce encore! Un exemple: actuellement, les pénalités pour un Suisse qui dissimule un étranger en situation illégale se montent à quelques milliers de francs ou quelques mois de prison. Avec la nouvelle loi, la sanction pourra atteindre un demi-million de francs et cinq ans de prison. La notion de «motif honorable», qui pouvait légitimer un tel acte, a aussi été supprimée. On part donc du principe que cacher un étranger est déshonorant. C'est une loi nazie! Elle est faite pour décourager les paroisses qui, comme dans le canton de Vaud, ont accueilli des étrangers menacés de renvoi.
Il y a aussi un autre point, dont je me suis entretenu avec le président de l'EPFL Patrick Aebischer. Aujourd'hui, les étudiants étrangers qui obtiennent un doctorat en Suisse, souvent après 7, 8 ou 10 ans d'études, sont expulsés dans les quinze jours. J'avais déposé une motion, adoptée par le Conseil national, pour qu'ils reçoivent désormais un permis de séjour. Or, avec la nouvelle loi, on n'acceptera des étudiants étrangers que dans la mesure où on est sûr qu'ils vont quitter la Suisse après. Il faut vraiment être intoxiqué par une peur panique des étrangers pour voter ces deux lois! L'intention dont elles procèdent, c'est d'arriver à «zéro immigration».
Comment expliquez-vous que le PDC suisse les ait soutenues aussi massivement?
Il faut quand même souligner que lors de notre assemblée à Coire, tous les Romands, y compris Fribourgeois et Valaisans, s'y sont opposés. C'est la main de Doris Leuthard (présidente du PDC suisse et candidate au Conseil fédéral, ndlr) qui a fait que, malgré tout, ces deux lois ont été massivement acceptées. Autant j'ai une estime énorme pour Doris Leuthard, autant je pense qu'elle a fait là une erreur politique, qui sera reprochée lourdement au PDC à l'avenir.
Votre parti est-il à ce point déboussolé?
Oui. C'est un parti assiégé, qui ne peut pas se permettre de baisser lors des prochaines élections fédérales. Comme la fascination exercée par l'UDC joue beaucoup plus fort en Suisse alémanique, la présidence a vite fait son calcul. Cette stratégie peut, à court terme, s'avérer payante sur le plan électoral du côté alémanique, mais elle est incohérente avec la doctrine du parti, en particulier dans le domaine familial. La nouvelle loi sur les étrangers n'autorise plus le regroupement familial pour les enfants au-delà de douze ans, c'est inadmissible!
Le débat sur les «523» requérants d'asile déboutés dans le canton de Vaud peut-il contribuer progressivement à une prise de conscience plus large?
Oui, tout à fait. Il y a eu dans le canton de Vaud un véritable mouvement populaire. Les gens connaissent les requérants en question, ils sont là depuis dix ans. Le peuple a résisté et, finalement, le Conseil d'Etat n'a pas forcé la main. Si les deux lois xénophobes sur l'asile et les étrangers sont acceptées le 24septembre, les cantons romands feront de la résistance.
Le PDC vaudois a l'intention de présenter un candidat au Conseil d'Etat. Qu'a-t-il à apporter d'autre que, par exemple, les radicaux?
J'ai beaucoup de sympathie pour les radicaux, mais ils sont usés. Cela fait un siècle et demi qu'ils sont au pouvoir, c'est normal. Nous sommes un parti du centre. Et non pas du centre droit: ça ne veut rien dire. Le PDC ne fonctionne pas sur la base d'une idéologie.
Concrètement, sur quels dossiers le PDC veut-il agir?
D'abord sur le problème démographique. Le maintien d'une pyra- mide des âges correcte passe par une vraie politique familiale, et une politique d'immigration positive. Un deuxième enjeu serait de se préparer à l'épuisement des réserves de pétrole dans dix ou vingt ans. La loi sur l'énergie que vient d'adopter le Grand Conseil vaudois est d'une timidité! On pourrait chauffer des villes entières avec des pompes à chaleur, com- me c'est déjà le cas à l'EPFL. Et puis rouler dans des bagnoles comme on le fait maintenant, ça ne sera plus possible. Il est urgent de développer les carburants alternatifs et les transports publics.
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1 commentaire:
Sale type, retourne en Belgique!
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