Avant la lecture biblique:
Mesdames, je vous demande de rester debout pour la lecture de l'évangile. Vous les messieurs, faites comme vous voulez.
Lecture: Marc 7, 24-30
MESSAGE
Comment vous êtes-vous senties, Mesdames, debout pendant la lecture?
Il y a 15 ans, un demi-million de femmes s'étaient mobilisées en Suisse pour revendiquer une véritable égalité. On peut se réjouir des progrès réalisés depuis et en espérer encore quelques uns. Mais égalité ne veut pas dire uniformité. Que fait-on des différences entre les hommes et les femmes? Ce serait dommage de les nier.
Faut-il un même régime pour tout le monde ou adapter selon les personnes? En éducation c'est une grande question: comment faire avec des enfants différents, en famille ou dans une classe d'école? Est-ce mieux d'avoir un système unique ou de chercher ce qui correspond à chacun? Quelle égalité mettre en place et comment? Faut-il parfois favoriser qqn pour tenter de reconstruire une égalité aux vues d'inégalités précédentes?
Ce qui paraît de toute façon injuste, c'est de brimer les uns simplement selon des critères de race, d'origine ou de sexe. Vous avez certainement ressenti l'arbitraire de ma recommandation tout à l'heure. Pourquoi les dames devaient-elles rester debout? ?a n'avait aucun sens. Pas plus que la différence de salaire pour des tâches et des compétences égales. Paul déjà invitait à se considérer tous d'égale valeur en Jésus-Christ, hommes et femmes, hommes libres et esclaves, juifs et grecs. Ce qui ne l'empêchait pas d'accepter les règles de son temps.
Dans le récit biblique, la femme qui s'adresse à Jésus est étrangère. Elle est rejetée par les disciples et par Jésus lui-même, seulement à cause de son origine. J'admire son courage, son audace, sa persévérance. Il paraît que souvent une mère ose faire des choses pour son enfant qu'elle n'oserait pas faire pour elle-même. J'admire aussi sa stratégie: elle ne contredit pas Jésus, elle entre dans son image (alors qu'elle pourrait se vexer d' être ainsi comparée à un chien). Quel doigté!
Son attitude est à l'opposé de celle de la victime qui s'enferme dans son malheur.
C'est le 1er élément que je souhaite garder: se déclarer victime d'injustice, la dénoncer, oui, dans un premier temps. Chercher à comprendre le raisonnement de celui qui est considéré comme l'oppresseur et si c'est possible arriver à lui faire faire un pas, n'est-ce pas ensuite plus dynamique et porteur d'espoir?
2ème point: Même Jésus ne met pas tout le monde sur pied d'égalité. Il y a des limites, dit-il. Je l'approuve: pour une qualité de ministère, il ne peut pas se mettre au service de tous. Il a une mission précise. Cela ressemble à certains arguments qui à mon avis se tiennent face à la politique d'asile: on ne peut pas accueillir sans limites. Les différences culturelles, ça compte. Qui trop embrasse mal étreint dit le proverbe. Voilà une certaine sagesse qui s'exprime, un certain bon sens.
Et c'est le 3ème et dernier point que j'aimerais mettre en évidence: Jésus va se laisser convaincre. J'aime son ouverture d'esprit, sa capacité à tenir compte de l'effort de l'autre, et de ses arguments. Tout n'est pas joué d'avance, bien que Jésus ait une opinion bien tranchée. Il peut écouter, et même changer de point de vue, en admirant celle qui a su faire passer son message.
Puisque c'est le dimanche du réfugié, j'aimerais être encouragée avec ce texte biblique à me mettre à la place de celui qui fuit son pays et qui espère quelque chose du nôtre. Combien d'obstacles a-t-il déjà franchi pour arriver ici? A-t-il été traité de petit chien? Ou pire? Quel est son parcours? Quels sont ses peurs? Ses espérances?
J'aimerais aussi être encouragée à mesurer les difficultés de l'accueil, à exprimer nos limites, mais aussi nos possibilités, nos valeurs, nos priorités.
A partir de là, quelles miettes seront à disposition sous la table? Dans notre pays riche je suis convaincue que nous pouvons partager un peu de nos ressources sans risquer de manquer.
Comme Jésus qui reçoit de cette femme un élargissement de sa mission, une nouvelle compréhension de celle-ci, nous avons nous aussi qqch à apprendre et à recevoir en rencontrant ceux qu'on écarte. A partir de cette rencontre, Jésus déplace sa limite.
Souvent nous avons des principes qui s'assouplissent avec la pratique. Beaucoup de parents le constatent en matière d'éducation. Faire avec n'est pas la même chose que le beau discours hors situation. Et c'est comme ça dans tous les domaines. Quand nous sommes face à la réalité, on adapte les principes. Chaque rencontre permet d'enrichir le point de vue et ouvre le chemin.
Quand Jésus dit je suis le chemin, il ne dit pas: je connais le chemin, je le maîtrise, mais: ce chemin est vivant, en devenir, en mouvement.
Avec la femme étrangère, Jésus est poussé dans un territoire au-delà de la frontière qu'il croyait juste et correcte. Jésus, toujours en chemin l'est aussi dans la compréhension de son ministère, de sa vérité et de sa vie. Cette rencontre qui aurait pu laisser chacun mécontent (mécontent d'être dérangé – mécontente et même fâchée de n'avoir rien obtenu) deviendra source de reconnaissance pour les 2 interlocuteurs, et source de vie pour l'enfant malade.
Que nous puissions, nous aussi, ne pas rester figés sur nos positions mais vivre des rencontres qui nous ouvrent de nouveaux horizons.
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