jeudi 23 mars 2006

La famille Taletovic, un cas de détresse qui a déjà ému un millier de


Légende de la photo de Chantal Derwey:
Edin et Samela Taletovic, parents de la petite Amina, sont incapables d’imaginer un retour dans leur pays, où ils n’ont ni famille, ni logement, ni perspectives d’emploi. Ce qui rend l’idée d’une expulsion par-dessus tout insupportable, c’est la venue au monde, d’ici l’été, d’un deuxième enfant. Leur sort est entre les mains des députés vaudois.

Voici l'article d'Estelle Bressoud publié dans 24heures
Une pétition déposée au Grand Conseil réclame un geste en faveur d’une famille bosniaque au passé douloureux, menacée d’expulsion.

Un deux-pièces orné de fleurs en plastique, mais un climat lourd de silence et d’incertitude. «Nous sommes sous mesures de con­trainte depuis six mois. La po­lice peut débarquer n’importe quand», laisse échapper Edin Taletovic dans un français hési­tant mais clair. Il enchaîne, le regard désenchanté: «On a ça dans la tête tous les matins, tout le temps. Ça nous rend tristes.» La situation de ce père de famille de 31 ans, de son épouse Samela et de leur fillette Amina, 4 ans, n’a rien d’un conte de fées. Son caractère dramatique a suscité un élan de soutien populaire, qui s’est tra­duit par le récent dépôt d’une pétition auprès du Parlement vaudois ( lire encadré). Elle fait état de 1249 paraphes.

Enceinte de cinq mois
En 2001, en proie à la famine et à l’errance, le couple quitte sa Bosnie natale alors en guerre pour la Suisse. Au cours d’un séjour partagé entre Bex, Vevey, Montreux et Aigle, il se voit confirmer son renvoi en jan­vier 2005, par la Commission de recours en matière d’asile. Entre-temps, Samela a accou­ché d’Amina, qui devrait débu­ter sa scolarité en août pro­chain. Et surtout, traumatisée par les atrocités liées à la chute de Srebrenica, elle continue de présenter de sévères troubles de santé, malgré une prise en charge thérapeutique.
Un retour au pays? Edin Tale­tovic, orphelin de père depuis son enfance et de mère depuis 2002, est incapable de l’imagi­ner. «Je n’ai pas de famille.» Personne pour accueillir les Taletovic, pas non plus de loge­ment, encore moins de perspec­tives d’emploi. Mais ce qui rend l’idée d’une expulsion par-des­sus tout insupportable, c’est la venue au monde, d’ici l’été, d’un deuxième enfant. «Je sou­haite qu’il naisse en Suisse», confie Edin.
La pétition, un baume
Dans le couloir de l’attente, cet électrotechnicien de forma­tion tue le temps en perfection­nant son français via les cours proposés par le Service commu­nautaire de la Planchette, à Aigle.
Il n’a obtenu que très briève­ment l’autorisation de tra­vailler en Suisse. Dans un quo­tidien marqué, dit-il, par la tris­tesse et l’angoisse, l’élan de sympathie exprimé par les si­gnataires agit comme un baume. «C’est bien pour nous. Il y a encore quelqu’un qui pense à nous, qui nous com­prend. »

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