Lire l'éditorial de Didier Estoppey dans le Courrier
Ce journaliste engagé a une vision bien plus mitigée sur la campagne de récolte que son collègue Antoine Grosjean, lisez plutôt:
Les Suisses voteront-ils en septembre prochain sur les lois sur l'asile et les étrangers soufflées par Christoph Blocher aux Chambres fédérales, qui les ont avalisées en décembre dernier? C'est probable, mais rien n'est encore gagné. A mi-chemin de la campagne référendaire qui doit faire valider, d'ici au 6 avril, 50 000 signatures contre chacune des deux lois, on n'en est en effet qu'à la moitié de la récolte.
Il est difficile d'avoir un décompte précis des paraphes engrangés, différents comités pilotant l'opération au plan suisse. Vendredi dernier, la Coalition pour une Suisse ouverte, qui chapeaute le double référendum, annonçait 23 000 signatures contre la Loi sur l'asile, et 15 000 contre celle sur les étrangers. Hier, l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés, qui emmène la coalition d'ONG combattant la Loi sur l'asile, annonçait quant à elle 30 000 paraphes contre cette dernière. Des chiffres qui, quoi qu'il en soit, devraient inciter les militants battant le pavé à ne pas hiberner...
D'autant que la barrière de rösti semble passer par là. Genève (plus de 6000 signatures), Vaud (près de 4000) et Neuchâtel (environ 3000) représentent à eux seuls environ la moitié des signatures récoltées contre les deux lois. Des chiffres qui pourraient préfigurer des clivages entre Suisse romande et alémanique quand il s'agira de mener campagne sur le fond.
Même à Genève, la récolte se déroule dans un climat parfois émotionnel. Le conseiller municipal Jacques Mino racontait ainsi récemment s'être heurté, en faisant ses moissons au marché de Carouge, à un octogénaire regrettant qu'on n'ait pas en Suisse un nouvel Hitler... Avant de rencontrer un autre octogénaire, franco-suisse, s'emparant vigoureusement du stylo: «Je sais pourquoi je signe. Je suis un rescapé des camps.»
Les deux «lex Blocher» sont-elles le signe d'un retour aux années brunes? Le maire de Genève, le socialiste Manuel Tornare, semble répondre par l'affirmative. «L'esprit pronazi n'est pas mort!» a-t-il lancé mercredi dernier au Conseil municipal, lors d'un débat lui aussi très passionnel. Objet de la discussion: une motion de la gauche et du PDC demandant à la Ville d'étudier diverses mesures en son pouvoir pour venir en aide aux requérants frappés de non-entrée en matière, condamnés à une assistance minimale. Parmi les mesures envisagées: des programmes d'occupation légèrement rémunérés et l'organisation d'assises cantonales sur la question.
Adoptée à une large majorité, la motion n'en a pas moins permis à l'UDC Marc-André Rudaz de fustiger ceux qui traitent son parti de «fasciste» alors que celui-ci ne cherche qu'à opérer un tri entre vrais et faux requérants. Ou aux radicaux et aux libéraux de se distancier de l'UDC tout en déclarant ne pouvoir signer un texte risquant de créer un appel d'air à Genève, la question étant de ressort exclusivement fédéral.
«Genève se doit d'entrer en résistance contre le durcissement en cours, a rétorqué l'écologiste Marguerite Contat Hickel. Il en va de notre honneur.» Restera à en étudier les formes. Interrogé par nos soins, Manuel Tornare nous a assuré vouloir consulter ses services juridiques pour voir jusqu'où pouvait aller le Conseil administratif dans un soutien aux référendums.
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