L’effet Fukushima ne se fait plus ressentir. La situation économique commence à inquiéter les Suisses. Le PLR et le PDC relèvent la tête.
L’effet Fukushima? De l’histoire ancienne, si l’on en croit le dernier baromètre électoral réalisé entre le 25 juillet et le 6 août par l’institut gfs.bern pour le compte de la SSR. Les questions migratoires constituent la principale préoccupation des 2005 personnes interrogées, détrônant ainsi les problèmes environnementaux et climatiques. Elles sont citées comme le problème le plus urgent par 26% des personnes questionnées alors que 17% les placent au second rang de leurs soucis. L’environnement est cité en premier par 16% des sondés et comme deuxième préoccupation par 13%.
Quant à la situation économique, qui n’inquiétait quasiment personne lors des précédentes prises de température, elle occupe désormais le troisième rang des thèmes qui intéressent les Suisses: 7% considèrent que c’est désormais le thème politique majeur alors que 6% la classent en deuxième position (lire ci-dessous). «Et je pense que les questions économiques tournant autour du franc se profilent comme nouveau thème électoral», pronostique Claude Longchamp, directeur de l’institut gfs.bern. Un autre enjeu pourrait encore venir brouiller les cartes: le retrait d’une conseillère fédérale, par exemple. La tuerie d’Oslo et le débat sur l’extrémisme qui l’accompagne n’ont en revanche eu aucune incidence sur la campagne.
L’éclipse de la thématique environnementale au profit des questions migratoires et économiques se reflète dans les perspectives électorales des partis. Alors que la catastrophe de Fukushima avait augmenté la cote des Verts, les faisant passer de 8,5% des intentions de vote en octobre 2010 à 10,9% en avril, ils stagnent désormais à 10,1%.
Claude Longchamp observe une tendance similaire pour l’UDC. Lors des premiers sondages, ce parti était encore largement porté par les résidus de la campagne de novembre sur l’expulsion des criminels étrangers. L’UDC avait tutoyé les 30% en début d’année (29,9% en avril). Mais elle n’a tiré aucun profit du débat énergétique et, si elle fait de gros efforts pour maintenir la migration comme thème numéro un (notamment par une initiative populaire sur la libre circulation des personnes), l’UDC s’inscrit en recul par rapport aux précédents sondages et à 2007. Ses perspectives électorales se situent désormais à 27,4%, soit 1,5 point de moins qu’il y a quatre ans.
«On assiste en revanche à un recentrage, mais sur quatre partis et pas seulement sur deux», commente Claude Longchamp. Portés par l’attrait de la nouveauté, les deux derniers arrivés sur la scène politique, les Verts libéraux (VL) et le Parti bourgeois-démocratique (PBD), confirment les prévisions précédentes. Les premiers obtiennent 4,6% des intentions de vote et les seconds 2,9%. Pour leur part, le Parti libéral-radical (PLR) et le PDC relèvent la tête. Après être descendu à 15% en juin, le PLR remonte à 16,1%, ce qui reste cependant très en deçà de son objectif officiel (20%) et de sa part électorale de 2007 (17,7%). Quant au PDC, il remonte de 12,7% en avril à 15% alors qu’il se situait à 14,5% en 2007.
Comment expliquer cette évolution? Le PLR semble profiter du changement des priorités thématiques. «Après Fukushima, il a reculé dans les sondages car il n’a pas pu se positionner clairement sur la politique énergétique», rappelle Claude Longchamp. «Le PLR profite aujourd’hui des préoccupations économiques, car c’est un de ses domaines de compétence», complète sa collaboratrice, Martina Imfeld.
Les explications sont plus complexes pour le PDC. Alors que le PLR obtient la meilleure note (29%) pour ses compétences économiques, le PDC n’est jugé le plus apte pour aucun des thèmes majeurs du moment. Sa note moyenne (4%) se situe très loin derrière celle du PS (20,8%), de l’UDC (18,1%) et du PLR (12,1%).
Comment expliquer que sa cote remonte malgré tout dans les sondages? Claude Longchamp avance deux hypothèses. Premièrement, le PDC profite d’un transfert d’électeurs déçus du virage à gauche opéré par le PS. Deuxièmement, il est perçu comme le parti qui forge les majorités. «Il ne parvient pas à se profiler sur des thèmes majeurs. Il reste le parti de la famille, mais ce thème n’est pas central aujourd’hui. En revanche, comme l’a relevé son chef de campagne, Gerhard Pfister, sur un blog, le fait de ne pas avoir de positions claires lui permet de mieux négocier avec les autres.»
L’institut de sondage s’est risqué à une extrapolation sur les chances de progression ou risques de recul de chaque parti aux élections du 23 octobre. Il affirme ainsi «à 99%» que les VL gagneront du terrain, se dit sûr à «90%» que le PLR perdra des voix et «à 85%» que l’UDC reculera également, la probabilité de voir le PS perdre quelques plumes étant de 78%. La progression du PDC paraît pouvoir se confirmer, «mais elle se situe dans la marge d’erreur», prévient Claude Longchamp.
Cela dit, gfs.bern observe une nouvelle tendance: le sentiment de l’impuissance des partis à agir croît; 32,2% des personnes sondées n’attribuent à aucun parti particulier la compétence de résoudre les problèmes les plus urgents. «Cela se traduit par un tassement de la mobilisation électorale», craint Claude Longchamp, qui s’inquiète surtout du faible taux de participation des jeunes: l’estimation est de 23% chez les 18-39 ans, contre 57% chez les 40-64 ans et 66% au-dessus.
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