vendredi 11 mars 2011

Les migrants tunisiens soumis à un "arbitraire total"

Plusieurs ONG de défense des droits de l'Homme ont dénoncé vendredi à Paris "l'arbitraire total" auquel sont soumis les migrants clandestins tunisiens après leur arrivée en Italie et "l'instrumentalisation politique de la question de l'immigration" en France.

Ces ONG, dont la Ligue française des droits de l'Homme (LDH), le Réseau euro-méditerranéen des droits de l'Homme (REMDH) et Migreurop, qui ont mené fin février une enquête en Italie et en Tunisie, ont exigé le respect des droits des clandestins tunisiens, dont plus de 7.000 sont arrivés en Europe depuis la chute de Ben Ali le 14 janvier.

"Les migrants tunisiens sont soumis à un arbitraire total en Italie: après leur arrivée sur l'île de Lampedusa, ils sont transférés sur le continent. Certains sont sont placés dans des centres d'accueil, d'autres dans des centres de rétention en vue d'une expulsion", a déclaré Sarah Prestani, du réseau Migreurop, au cours d'une conférence de presse. "Certains sont libres de leurs mouvements, d'autres sont enfermés; certains sont considérés comme des demandeurs d'asile, d'autres non. On ignore sur quels critères. Et quand on demande aux autorités italiennes combien de Tunisiens sont encore sur leur sol et dans quelle situation, nous n'avons pas de réponse", a-t-elle poursuivi.

En outre, les autorités italiennes envisagent "de regrouper tous les demandeurs d'asile dans un nouveau centre près de Catane, en Sicile", où ils seront "isolés" et "privés de toute possibilité de s'intégrer". Les ONG dénoncent aussi "l'instrumentalisation politique" de cette situation et le "discours alarmiste des autorités européennes, française et italienne en particulier, qui continuent à ne voir dans ce qui se passe en Méditerranée qu'un danger migratoire", a déploré Michel Tubiana de la LDH.

L'Italie représente pour nombre de ces jeunes immigrés une première étape avant de gagner la France, ancienne puissance tutélaire en Tunisie et où la communauté tunisienne est estimée à environ 600.000 personnes. "Pour l'instant, il n'y a eu aucune expulsion de Tunisien, ni de France ni d'Italie. Nous assistons à des discours officiels hypocrites et mensongers sur les risques d'une invasion de clandestins dont la seule conséquence est une atteinte aux droits des migrants", a déclaré Omeyya Seddik, du REMDH.

Les ONG ont expliqué que les autorités italiennes n'avaient transmis au gouvernement tunisien aucune demande sur des refoulements de Tunisiens, "notamment parce que l'accord sur les flux migratoires passé en 1998 entre Tunis et Rome sera sans doute renégocié", selon Migreurop. En France, "l'immense majorité des Tunisiens qui sont arrêtés sont remis en liberté", selon les ONG.

En déplacement en France, le ministre tunisien du Tourisme Mehdi Houas s'est dit vendredi "consterné" par les propos d'une député française du parti du président Nicolas Sarkozy, qui a proposé de "remettre dans les bateaux" les migrants tunisiens, et "très en colère" à l'égard des autorités italiennes. La Tunisie accueille des dizaines de milliers de réfugiés de Libye "parfois sans papiers, contrairement à nos amis Italiens qui ont eu une réaction qui n'est pas conforme à ce que l'on attend d'un Etat de droit", a-t-il déploré au cours d'un point presse à Paris.

AFP

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