Une étude commandée par l’Office fédéral des migrations démontre que la suppression de l’aide sociale n’est pas aussi efficace qu’attendu.
C’est un héritage de l’ère Blocher: depuis le 1er janvier 2008, tous les requérants d’asile déboutés sont privés d’aide sociale, et plus seulement ceux frappés d’une décision de non-entrée en matière. La mesure était censée s’avérer dissuasive, et pousser ceux qui ne bénéficient que d’une aide d’urgence à quitter plus rapidement la Suisse. Or elle ne l’est pas autant qu’espéré. C’est ce qui se lit entre les lignes d’une étude commandée par l’Office fédéral des migrations (ODM).
Dans son communiqué, l’ODM préfère voir le verre à moitié plein. Il souligne que la moitié des personnes déboutées ne recourent pas à l’aide d’urgence et quittent la Suisse, et que «seuls 15%» continuent à la percevoir au bout d’un an. Mais cela signifie également que près de 50% restent en Suisse, sans forcément revendiquer cette aide minimale garantie par la Constitution – environ 8 francs par jour, un toit et des soins médicaux si nécessaire. La situation inquiète les cantons, compétents en matière d’exécution des renvois. Ils reçoivent de la Confédération un forfait de 6000 francs par requérant débouté pour les coûts liés à l’aide d’urgence, mais passent à la caisse dès que ce montant est dépassé.
Interdites de travail, peinant à s’intégrer et sans le sou, ces personnes vivent dans des conditions très précaires. Du coup, des privés et œuvres d’entraide viennent à leur secours. «Le soutien des sociétés civiles et des partis politiques apporté aux requérants a tendance à accroître la durée de séjour des bénéficiaires de l’aide d’urgence», souligne l’étude.
«Une idéologie de répression»
D’autres facteurs sont mis en avant. Comme le fait que les renvois ne peuvent pas toujours être exécutés: certains pays rechignent à reprendre leurs ressortissants. Recourir à l’aide d’urgence est aussi pour certains un scénario moins rebutant que le retour dans leur pays d’origine. Que faire face à un pareil casse-tête? Selon l’étude, les cantons peuvent agir à deux niveaux: en «mêlant judicieusement mesures incitatives et sanctions en ce qui concerne le régime de l’aide d’urgence et en intensifiant leurs efforts en vue de l’exécution des renvois». Elle souligne qu’il est d’une «importance capitale de disposer d’un nombre suffisant de places de détention, de bénéficier d’une certaine disponibilité pour les opérations policières et d’avoir la possibilité de transférer des personnes en vue de leur identification». Un groupe de travail va se pencher sur les solutions à apporter.
Pour l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés, «cette idéologie de répression, qui ne tient pas compte des personnes vulnérables, ne change rien». «Il est irresponsable de pousser ces personnes dans une situation de précarité sans respecter la dignité humaine», commente le porte-parole Adrian Hauser.
Valérie de Graffenried dans le Temps
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