Au cours de ce Conseil européen charnière, où seront discutés des points institutionnels, économiques et environnementaux, les Vingt-Sept devraient adopter le programme de Stockholm. Un article de Fabien Perrier, envoyé spécial de l’Humanité à Bruxelles.
Malgré la crise des dettes grecque et espagnole (voir ci-contre), le Conseil européen des 10 et 11 décembre devrait consacrer une partie de ses travaux à la relève des programmes de Tampere (1999-2004) et de La Haye (2005-2009), qui orchestraient les politiques de liberté, de sécurité et de justice au sein de l’Union. Dorénavant, en la matière, le « programme de Stockholm » sera la feuille de route quinquennale en vigueur.
Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, avait expliqué, en juin 2009, vouloir « rendre plus tangibles pour les citoyens les bénéfices de l’espace de liberté, de sécurité et de justice ». Cet objectif est repris au premier des six points qui structurent ce programme. Il est intégré à la partie « promouvoir la citoyenneté et les droits fondamentaux ». Mais d’ores et déjà, « citoyenneté et droits fondamentaux » ne recouvreront pas les mêmes valeurs. En effet, si le traité de Lisbonne rend contraignante la Charte européenne des droits fondamentaux, certains pays (Royaume-Uni, Pologne, République tchèque) ont décidé d’y déroger.
Les autres points concernent l’Europe du droit et de la justice, « l’Europe qui protège » (lutte contre la criminalité, le terrorisme…), l’accès à l’UE (notamment des hommes d’affaires, scientifiques, étudiants), l’immigration et l’asile (« il est nécessaire d’empêcher et de prévenir l’immigration illégale »).
Ce qui se cache sous « liberté, justice et sécurité » est assez loin de ce que ces vocables recouvrent habituellement. L’expression « prévenir et contrôler l’immigration illégale » le confirme. « Une fois de plus, à l’échelle européenne, se dégage cette tendance à tracer un signe égal entre délinquance et immigration », note la députée européenne Marie-Christine Vergiat (GUE-NGL). Elle déplore que « l’UE ne respecte pas les droits fondamentaux » des immigrés et fasse en fait « le jeu de l’immigration clandestine ». Les statistiques confirment son propos. En 2008, sur les 280 000 demandes d’asile formulées, seules 76 000 ont été acceptées par les pays de l’UE. Et depuis, le « pacte européen pour l’immigration », adopté sous présidence française, durcit encore cette politique.
L’Europe en construction ressemble toujours plus à une forteresse. Le Parlement européen a souligné, dans une résolution, l’importance d’accorder aux migrants l’accès à la justice, au logement, à l’éducation et aux soins de santé. Il vient, enfin, d’attribuer le prix LUX au film Welcome, de Philippe Lioret. Sera-t-il entendu par les 27 chefs d’État et de gouvernement ? Il est à espérer, en tout cas, que le message d’humanisme et de tolérance parvienne à leurs oreilles avant 2010.
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