Une trentaine de migrants sont arrivés dans l’abri PC des Oies. Un passage en douceur, facilité par une organisation aux petits soins. Un article de Gilles Biéler pour 24 Heures.
«C’est la pire des solutions.» Responsable du secteur Nord et Ouest à l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM), Cécile Ehrensperger ne cache pas les difficultés à accueillir une centaine de personnes dans un abri de protection civile. Mais fait tout pour y mettre un peu de lumière. Car depuis hier, les premiers réfugiés dits «Dublin» (lire ci-dessous) du contingent nyonnais dorment dans la commune. En sous-sol, sans fenêtre ni autre aération que le bruit incessant de la ventilation.
Ainsi, au matin, les responsables du site de s’inquiéter de la réaction de leurs «invités». «Nous avons vraiment pris le temps de leur expliquer la situation, mais rien ne dit qu’ils auront pleinement réalisé qu’ils ne pourront pas, pour la plupart, rester en Suisse», constate la responsable, qui a préféré leur éviter un assaut de la presse. Ce même si tout s’est finalement bien passé. «Mieux vaut leur laisser le temps d’arriver.»
Efforts d’aménagement
En à peine plus d’un mois, les services de l’EVAM ont fourni des efforts considérables pour offrir un semblant de chaleur à un lieu qui en manque cruellement (au propre comme au figuré, puisqu’il y a moins de deux semaines, le thermomètre à l’intérieur affichait deux degrés en dessous de zéro). Il y a d’abord ces deux spacieuses salles de détente avec téléviseur et canapés, appelées à évoluer, à vivre avec leurs occupants. Sans compter les matelas neufs et d’autres aménagements plus anecdotiques tels ces désodorisants dans chaque dortoir (cinq à quinze places, plus un de vingt-cinq lits). «On a vraiment cherché à améliorer au maximum les conditions dans lesquelles certains vivront pendant trois, voire six mois. Cela dit, il y a encore six ou sept ans, certains réfugiés passaient jusqu’à deux ans dans des abris. Alors que, cette fois, il s’agit vraiment d’une solution d’urgence…»
Pour autant, comment s’assurer, surtout dans ce cadre de vie, que l’une ou l’autre de la centaine de personnes appelées à rejoindre Nyon ne prendra pas la poudre d’escampette? «Rien! Ils ne sont pas en prison et font ce qu’ils veulent! On n’est pas là pour les enfermer, mais pour leur assurer des conditions de vie décentes… Ils ont le droit de recevoir des visites, d’amener de l’alcool, de s’amuser, de sortir le soir…»
Pas de faux espoirs
Cela, alors que toute la journée sont proposées diverses activités à l’Esp’Asse. Une structure d’accueil de jour qui n’existe pas dans les autres centres. «La situation, avec cet hébergement en abri, exigeait que nous prenions des mesures différentes. Nous avons donc engagé deux animateurs chargés d’occuper les journées des personnes que nous accueillons.» Et pas question ici de donner des cours, mais juste d’occuper les migrants. «Donner des cours de français, par exemple, c’est leur laisser croire qu’ils pourront rester. Et l’on ne respecte pas quelqu’un en lui donnant de faux espoirs…»
Quant aux problèmes de sécurité, aux éventuelles frictions entre cultures différentes (ici cohabiteront Irakiens, Sri Lankais, Somaliens, Nigérians…), Cécile Ehrensperger n’a aucun souci. Certes, il y a eu ce coup de couteau la semaine dernière au centre de Sainte-Croix, «mais c’est un cas isolé! Ces gens ont l’habitude de s’adapter à d’autres coutumes et les risques de violence sont les mêmes que partout ailleurs, lorsqu’on rassemble plusieurs personnes dans un même lieu.»
Dublin, c’est quoi?
Par «cas Dublin», on entend des personnes ayant déjà été enregistrées dans un autre pays de l’Espace Schengen. La Suisse en étant membre depuis décembre 2008, elle a désormais accès à une base de données européenne recensant toutes les demandes d’asile de l’Espace. Ainsi, un réfugié tentant sa chance en Suisse après s’être déjà enregistré ailleurs est censé être renvoyé dans le pays tiers. Pour autant que celui-ci ne refuse pas d’entrer en matière. Dans ce cas, le migrant intégrerait la procédure classique de demande d’asile en Suisse.
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