Des demandeurs d'asile passent jusqu'à soixante jours dans la zone de transit. Reportage dans Bonne Nouvelle
Meleke, Alagie, Ousman dans l'un des dortoirs au sous-sol de l'aéroport. Photo : Eric Roset |
«Je rêve de rester en Suisse et de reprendre mes études d'économie. Si on me renvoie dans mon pays, je serai tué, c'est sûr.» Ousman a 22 ans, il est Gambien. A son arrivée en Suisse, il a dûment expliqué que sa vie était en danger depuis que son oncle avait été accusé de complicité dans un coup d'Etat. Après 47 jours passés dans la zone de transit, il n'a qu'un espoir: que la Suisse lui permette d'échapper à son destin.
Pour les vacanciers et les hommes d'affaires entre deux avions, la zone de transit? Un no man's land. Un lieu de passage où l'on grignote un sandwich en déambulant dans les duty free.
Pour la centaine d'hommes et de femmes en quête d'asile qui y séjournent chaque année jusqu'à soixante jours, l'endroit n'a rien d'un préambule aux vacances. C'est une zone de rétention, un espace fermé où le temps est suspendu dans l'attente d'une décision de l'Office fédéral des migrations (ODM).
Interminable attente
Pour rejoindre le lieu d'hébergement des requérants, sécurité aéroportuaire oblige, le journaliste doit montrer patte blanche. Après une vérification scrupuleuse de mon identité, je suis conduite au sous-sol. Au fond d'interminables couloirs, trois pièces borgnes hébergent jusqu'à 35 personnes. Un dortoir pour les hommes, un pour les femmes. Et une pièce commune flanquée d'une table, de canapés et d'une télévision offerte par les aumôniers. Les journées y sont interminables. Il n'y a rien d'autre à faire qu'attendre.
Devant la télévision qui crache des informations qu'ils ne comprennent pas, Saini et ses deux compatriotes pendjabi tuent le temps en assemblant les pièces d'un puzzle, fourni par les aumôniers. «J'aime surtout faire des sudoku, et je me distrais en regardant MTV», raconte Saini dans un anglais approximatif.
Il a fui le Pendjab en raison des troubles politiques qui agitent ce petit Etat indien coincé entre le Pakistan, le Cachemire et le Rajasthan. A son arrivée, ses papiers et son argent ont été confisqués par la police. Ce qui lui manque surtout, c'est de ne pas pouvoir respirer à l'air libre.
La loi prévoit une sortie quotidienne escortée sur le tarmac de l'aéroport. Or la plupart des requérants ne sortent pas plus de deux fois par mois. Interrogé, l'Office fédéral des migrations botte en touche. «L'expérience a montré que les requérants ne saisissent que rarement l'occasion de sortir lorsqu'elle leur est proposée.»
Il est vrai que sortir sous une pluie battante pour longer la piste de décollage n'est pas la promenade la plus alléchante qui soit. En conséquence, «ce sera désormais aux requérants de solliciter une sortie accompagnée sur le tarmac». Mais personne n'a pris la peine de transmettre l'information aux requérants, pas plus qu'aux aumôniers. Saini, pourtant, aurait aimé respirer à l'air libre, même sous la pluie.
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