samedi 1 décembre 2007

Avec les laissés pour compte de l'Asile


Lire cet article de Bonne NOuvelle
Plus de 800 personnes contraintes d'évacuer leur appartement, de liquider leurs biens et de rejoindre des centres d'aide d'urgence avec le strict minimum. Tel est le résultat, dans le canton, de l'entrée en vigueur au 1er janvier 2008 des nouvelles lois sur l'asile. Les déboutés n'ont désormais plus droit ni à l'aide sociale ni à gagner leur vie. L'aide restrictive d'urgence leur est accordée jusqu'à leur départ.

Le premier déménagement a eu lieu le 16 novembre au Centre du Simplon à Lausanne. Un bras de fer s'est engagé, car une mère «tenait à prendre deux petits meubles avec les affaires de son enfant, des jouets, une télé», raconte Pierrette Iselin, une bénévole. La consigne l'interdisait. Les affaires ont finalement passé, mais pas les meubles qui ont fini déchiquetés dans une benne.

La bénévole s'offusque: «J'ai surpris des mots échangés par les gardiens du foyer et le personnel: ‹Pour les suivants, il s'agira d'être strict: des habits et un matelas, c'est tout.›»

Brigitte Zilocchi, aumônier protestant des réfugiés, est déjà débordée d'appels à l'aide. «Cette réalité attendue était tellement impensable que les concernés l'ont occultée jusqu'au bout, confie-t-elle. Maintenant, ils ont reçu leur lettre de transfert, cela devient concret. Je peux vous dire qu'ils ne vont pas bien.»

Devant l'ampleur du choc, protestants et catholiques offrent leur aide. Peu de chose: une liste d'une dizaine de pasteurs et diacres prêts à écouter. «Nous ne pouvons plus changer la loi, mais faire un accompagnement de deuil», explique Brigitte Zilocchi. Peur des sanctions, comme certains le craignaient lors des votations? «Je n'ai pas le droit d'inciter au séjour illégal en Suisse ou de loger un débouté, mais je peux donner à manger et un habit à une personne en détresse», assure l'aumônier.
Quitter le pays

Qu'est-ce que l'aide d'urgence? Il s'agit de ce qui reste à un débouté jusqu'à son départ. Concrètement, les familles sont logées, à quatre par pièce, dans des foyers à Lausanne, à Bex et à Leysin. Elles reçoivent 9 fr. 50 par jour et par personne. Les célibataires sont transférés dans d'autres centres, à Vennes et à Vevey. Ils reçoivent repas et bons «pour des articles d'hygiène», pas d'argent. La liberté dans les centres, qui sont gardés, est restreinte.

Seules les familles sont encore affiliées à une assurance maladie. Pour les autres, les ennuis de santé se règlent aux urgences. «Pour un problème de dent, ils se rendent à la clinique dentaire qui l'arrache, faute de moyens pour d'autres soins», observe l'aumônier. L'ultime papier du débouté est une lettre précisant son illégalité en Suisse et l'ordre de partir. Dès qu'il se balade en ville, il peut être arrêté et amendé - n'ayant d'argent, il risque la prison.

Les mesures visent bien sûr à accélérer les départs. Pas si simple pourtant, sait déjà Brigitte Zilocchi: «Par peur, les ressortissants de certains pays, comme le Togo, ne vont pas rentrer. Ils craignent d'y être emprisonnés pour avoir fui et donc trahi leur pays. D'autres Etats, comme l'Ethiopie, l'Erythrée ou la Somalie, réexpédient aussitôt en Suisse les déboutés renvoyés de force.»

Autre problème: les apatrides. «Des millions de personnes dans le monde n'ont jamais été inscrits dans un registre de naissance, rappelle l'aumônier. Si elles ne peuvent fournir les preuves de leur origine, la Suisse inscrit sur un formulaire ‹provenance inconnue›. A partir de là, aucun pays ne les veut, ils n'ont pas le droit de rester et nulle part où aller!»

Brigitte Zilocchi craint une augmentation des candidats à la clandestinité. Sauf qu'au 1er janvier entre aussi en vigueur la loi sur le travail au noir, avec son lot de sanctions plus sévères pour les employeurs. «Les conditions de ceux qui disparaîtront dans la nature seront misérables, prévoit Brigitte Zilocchi. Comment vont faire les familles? Je suis inquiète de la détresse psychique de ces gens. Dans la pyramide des besoins élémentaires, ils sont tout en bas, sans perspective de remonter. J'accepte qu'il y ait des lois, mais pas qu'on joue avec des êtres humains.»
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