mardi 20 novembre 2007

Sanctuaire administratif pour requérants déboutés?

Pourra-t-on arrêter un requérant débouté qui se présente au Service de la population? Oui, dit la droite. Non, proteste la gauche. Les députés vaudois trancheront aujourd'hui. Un article de Laurent Busslinger dans 24 Heures.


REFUGE?: Les locaux du Service de la population à Lausanne.
«Ceux qui s'y rendent doivent savoir qu'ils ne se feront pas
embastiller», argumentent la gauche, les Verts et certains radicaux.
«Les forces de l'ordre doivent pouvoir faire leur travail où que
ce soit», rétorquent l'UDC, les libéraux et d'autres radicaux.
ACCUEIL DU SPOP, LE 19 NOVEMBRE 2007
PATRICK MARTIN


C'est «la» pierre d'achoppement d'un texte sensible par nature. Ce matin, les députés diront comment Vaud appliquera la nouvelle loi fédérale sur les étrangers, et quel y sera le statut du Service de la population (SPOP). La police pourra-t-elle s'y saisir d'un requérant débouté? L'endroit sera-t-il au contraire un refuge provisoire où il ne craindra rien?
Dans un canton qui s'est longtemps signalé par sa résistance aux directives de Berne, où l'accueil des étrangers a mené à la crise dite des 523 avec la Confédération, le sujet est hautement symbolique. Même si en septembre 2006 Vaud acceptait par 54% des voix des textes qui ont obtenu 67% de oui dans toute la Suisse.

Pas pour les délinquants
L'article litigieux est bref: «Les mesures de contrainte sont interdites dans les locaux de la police des étrangers lorsque l'étranger s'y rend pour répondre à une convocation, ou recevoir une prestation d'urgence. Nul ne peut être arrêté durant les deux heures qui précèdent ou suivent une convocation. Cet alinéa ne s'applique pas aux étrangers ayant été condamnés pénalement.» Absente du texte du Conseil d'Etat, cette disposition y a été introduite par la gauche de la commission, renforcée par un radical.
«Il s'agit de dire que l'administration ne piège pas les gens, et leur permet d'avoir accès à l'aide d'urgence sans risquer l'arrestation», explique l'écologiste Philippe Martinet, président de la commission et rédacteur du rapport de majorité. L'accès à cette aide n'est en effet possible qu'à travers le SPOP. «Il s'agit aussi de continuer à faire oeuvre de persuasion en faveur d'un retour volontaire», poursuit l'élu vert. Toutes possibilités de recours et tous délais de départ échus, le SPOP peut maintenir un dialogue avec les requérants, pour tenter de leur faire reconsidérer leur conduite. «On a procédé ainsi avec succès durant la crise des 523. Les requérants osaient se rendre au SPOP, ils savaient qu'ils n'allaient pas se faire embastiller», poursuit Philippe Martinet. A gauche, on considère enfin que face, à une loi «globalement répressive», cet ajout est un compromis minimal.
«Les forces de l'ordre doivent pouvoir faire leur travail où que ce soit», rétorque Dominique Kohli. Auteur du rapport de minorité opposé à la sanctuarisation du SPOP, le libéral rappelle que ce type d'arrestation est exceptionnel: «Une dizaine de cas par an, et ce sont toujours des personnes qui peuvent rentrer dans leur pays, mais qui restent sachant que leur situation est illégale.»
«Le SPOP n'a jamais appâté et n'appâtera jamais quiconque pour s'en saisir, je ne l'admettrais pas», insiste de son côté Philippe Leuba, en charge du Département de l'intérieur. L'application de mesures de contrainte à l'intérieur du service ne se comprend, pour lui, «que face à quelqu'un qui refuse toute forme de collaboration pour son départ». Et si les 523 étaient hors de danger d'arrestation, c'est parce qu'une négociation sur leur sort restait engagée.

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