lundi 22 octobre 2007

Le populiste et xénophobe Blocher emporte la Suisse

Où s’arrêtera le vent mauvais du populisme alpin de Christoph Blocher ? Les élections législatives d’hier ont permis à l’UDC (la peu centriste Union démocratique du centre), de renforcer sa position de première force politique du pays acquise en 1999. Le parti de droite dure du tribun zurichois, ministre de la Justice et de la Police de la Confédération, effectue notamment une percée spectaculaire en Suisse romande : il devient la première formation dans les cantons de Vaud et Genève, où il détrône le Parti socialiste. Cette nouvelle poussée vient conforter une stratégie de conquête progressive du pouvoir entamée il y a plus de quinze ans.

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D’élection en élection, ce fils de pasteur protestant (il a 67 ans), assez truculent pour un Suisse, tisse sa toile en instillant dans les esprits la peur de l’extérieur. Premier gros succès politique le 6 décembre 1992, quand, seul contre tous les autres partis du pays, l’UDC blochérienne parvient à convaincre les Suisses de refuser l’adhésion à l’Espace économique européen (EEE), sorte d’antichambre à l’Union européenne. Les Balkans viennent de s’embraser. La Suisse se sent en première ligne, parce qu’elle voit débarquer des milliers de réfugiés (les Kosovars constituent, depuis plusieurs années, la première communauté étrangère du pays). Dans le nouveau contexte mondial qui suit l’effondrement du bloc de l’Est, la neutralité et la croix blanche ont perdu une grande partie de leur attrait.
Pour Berne, la tentation est forte de rejoindre les grands ensembles qui se dessinent autour d’elle. Mais pour Blocher, ce sera la carte europhobe. Pendant toute la décennie 90, il va bâtir sa popularité autour de ce socle. Il y ajoute la dénonciation des «étrangers profiteurs», ces immigrés qui abuseraient du système d’assurances sociales, et celle des «étrangers délinquants». Deux thèmes d’autant plus porteurs qu’au tournant des années 2000, les caisses publiques accumulent les déficits et la petite délinquance progresse de façon spectaculaire. «Il pose les bonnes questions, mais il apporte les mauvaises réponses», entend-on alors, notamment à gauche, après un nouveau succès de l’UDC en 2003. Le 1er janvier 2004, Christoph Blocher devient l’un des sept ministres du gouvernement de concordance qui dirige le pays. Il va profondément déstabiliser le fonctionnement bien huilé de cette très vieille institution.
Le politologue vaudois François Chérix dresse l’inventaire : «Soif de pouvoir inextinguible, auto-célébration narcissique, posture messianique du sauveur du peuple, désignation paranoïaque d’un ennemi extérieur (l’Europe) et d’ennemis intérieurs (les étrangers et les socialistes), attaques permanentes contre des institutions tournées en dérision.» Au début de sa carrière, Blocher se voyait en aiguillon pour réveiller une Suisse endormie. Il est devenu agitateur, puis très vite acteur à l’intérieur de ce même système, roi de l’improvisation tonitruante, irrespectueux du sacro-saint consensus suisse. Avec sa nouvelle victoire hier, le champion populiste a réussi tous ses paris. Y compris le plus insensé : homme d’affaires milliardaire, patron d’un groupe transnational (Ems-Chemie), il est parvenu à faire oublier à son frileux électorat que son évangile a beau être xénophobe, il est d’abord ultra-libéral.

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