Lire l'opinion d'Hélène Küng, directrice du Centre social protestant, publié dans la rubrique "Réflexions" de 24 Heures le 12 septembre dernier
Hélène Küng
C'est un trajet que vous faites tous les jours. Et là, plus moyen de passer. Un surveillant, une barrière. De l’autre côté, des ouvriers en combinaisons et masques s’affairent. Un véhicule transportant un chargement de produits toxiques s’est renversé. Jusqu’où vont les dégâts? Pourrat- on «décontaminer» l’eau ou le sol pollués? Ne vaut-il pas mieux essayer de prévenir ce genre d’accident, contrôler sévèrement le transport et la circulation de tels produits? Quelles lois sont nécessaires à cet effet? Et quelles mesures pour les faire respecter? Imaginez maintenant que les ouvriers tentant de circonscrire le sinistre ne sont pas seuls sur le périmètre. La barrière est rompue, un groupe s’affaire parmi les déchets, emplit et distribue des flacons de produit, encourage les passants à s’approcher et à se servir. «Monsieur, vous êtes pour la liberté? Alors, tenez! Halte à la censure! Liberté d’opinion! Non aux muselières!» Scénario loufoque? Plutôt quotidien. Depuis des semaines, on assiste à un arrosage organisé et coûteux de produits corrosifs. Images, slogans à haute teneur en acide décapant le dialogue, attaquant le ciment social, favorisant les fissures entre communautés. S’il est question d’en dénoncer ou d’en limiter la circulation, certains y voient une atteinte à la liberté d’expression. Pourquoi voir du danger dans des images et slogans à tendance raciste? Parce qu’ils associent un comportement délictueux et l’appartenance à un groupe. C’est contraire à l’Etat de droit, qui reconnaît la dignité et la responsabilité de tout individu, et qui sanctionne tout acte délictueux, sans le relier ni à l’apparence, ni à l’appartenance ethnique, religieuse, sociale. Exclure un groupe, c’est saper l’indispensable travail de dialogue, de respect mutuel, d’apprentissage des règles de vie commune.
Comment sécuriser le périmètre noyé sous cette publicité stigmatisante? La critiquer, est-ce la diffuser encore davantage – ou faut-il précisément la dénoncer comme telle, en identifier la toxicité? La deuxième solution est la plus sûre. C’est ce à quoi s’emploie la «norme pénale antiraciste », cet article de loi qui identifie les «produits» racistes et prévoit des mesures pour en empêcher la diffusion irresponsable. On peut penser ce qu’on veut, certainement! Mais si ce que je pense et ce que je prône met en danger la cohésion sociale, la dignité des personnes et l’Etat de droit (qui sanctionne le délit, pas l’appartenance à un groupe), alors heureusement qu’une loi est là pour limiter la diffusion irresponsable de mes opinions.
Pas dangereux, le racisme? Ne vous est-il jamais arrivé de vous laisser contaminer? De vous méfier d’une personne parce qu’elle a l’air «différent», de lui prêter des pensées ou des comportements suspects à cause de son aspect? Moi, ça m’est arrivé. Et je me fais régulièrement une cure de désintoxication. Par exemple, j’irai à la manifestation du 18 septembre, à Lausanne. Et je tire mon chapeau à la LICRA, qui a déposé une plainte pénale contre les supports publicitaires à tendance raciste.
Hélène Küng
Pas dangereux, le racisme? Ne vous est-il jamais arrivé de vous laisser contaminer? De vous méfier d’une personne parce qu’elle a l’air «différent», de lui prêter des pensées ou des comportements suspects à cause de son aspect? Moi, ça m’est arrivé. Et je me fais régulièrement une cure de désintoxication. Par exemple, j’irai à la manifestation du 18 septembre, à Lausanne. Et je tire mon chapeau à la LICRA, qui a déposé une plainte pénale contre les supports publicitaires à tendance raciste.
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