Lire l'article d'Alain Walther dans 24heures
Angeline Gauthier, aide-infirmière camerounaise, devrait quitter la Suisse après avoir soigné des aînés pendant dix ans. Levée de boucliers pour cette mère de deux enfants.
Qu'importe le froid, la vieille dame veut dire son mot. Elle a préparé une carte de vœux et la lit sans trembler. «Angeline, nous sommes près de toi. Que ton renvoi soit reconsidéré, que tu restes près de nous!»
Sur le parking d'un EMS lausannois, elle parle haut et clair aux noms des siens, les pensionnaires de l'EMS. Le personnel, accompagné du syndicat SSP, fait de même et entoure leur collègue, Angeline Gauthier Camerounaise de 33 ans. Par une lettre la direction de l'établissement itou. Sans oublier une pétition de 200 signatures et l'appui de 31 députés du Grand Conseil, tous partis confondus. Tout le monde aime Angeline Gauthier, aide-soignante en psychogériatrie et mère de deux enfants. Elle devrait pourtant quitter avec ses enfants la Suisse le 8 janvier prochain, selon une décision de l'Office fédéral des migrations (ODM).
Vaud: préavis favorable
Le préavis favorable du canton de Vaud n'y a rien changé; Berne ne veut pas délivrer une autorisation de séjour à Angeline, Stéphane et William. «Mais comment sont faites les lois, s'indigne Blaise Richard, pour qu'on repousse des gens comme cela?» Cette question tarabuste le responsable pédagogique des jeunes joueurs talentueux au Lausanne-sport également directeur d'un établissement secondaire lausannois.
Une intégration réussie n'est plus suffisante
A ses yeux, Stéphane Owana, fils aîné d'Angeline, est un modèle d'intégration réussie. Bon attaquant sur le terrain de foot et bon élève de 9e. Sa mère l'a fait venir du Cameroun. Il avait alors dix ans. Quant au deuxième enfant, aujourd'hui âgé de 5 ans, il a été reconnu par son père qui souhaite s'en occuper en Suisse.
Au bord du Lac de Sauvabelin sur les hauts de Lausanne, pas loin de l'EMS, l'aide-soignante fait une courte pause. Elle a peur et les journées sont longues entre l'accompagnement des patients âgés souffrant de troubles psychologiques et son foyer où elle vit seule avec ses deux enfants dans un immeuble d'Entrebois. «Je donne beaucoup ici depuis dix ans. Alors que la Suisse me laisse finir de m'occuper de mes enfants». Sa gorge est nouée par un sanglot quand elle raconte son chemin en Pays de Vaud. En 1996 Angelina Mfegue, jeune fille au pair à Prilly, épouse un premier Vaudois. En fait l'homme, père divorcé, veut une bonne à demeure.
Veuve trois mois trop tôt
La jeune femme n'a pas le droit de faire des études, Angeline n'obéit pas et suit les cours d'auxiliaire de santé de la Croix-Rouge suisse. Dix mois après le mariage, la jeune Camerounaise se retrouve au foyer pour femmes battues de Malley-Prairie. Viendra ensuite un deuxième mariage. Le mari décède à 82 ans en 2004. Pendant quatre ans et neuf mois, époux et épouse auront respecté le contrat qu'ils s'étaient fixé. Il voulait une infirmière à ses côtés pour ses vieux jours. Jusqu'au bout son vœu a été respecté. Elle souhaitait un permis d'établissement mais elle est devenue veuve trois mois trop tôt. «Je puis comprendre les suspicions de l'administration fédérale mais Angeline n'est pas une manipulatrice, insiste le pasteur Daniel Alexander, elle était liée à son mari par une authentique solidarité réciproque; ce n'était pas un mariage intéressé». D'ailleurs c'est Angeline qui gagnait l'argent du ménage. Le vieux Vaudois n'avait plus un sou vaillant et il était sous tutelle.
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