Tout se passe comme si l'UDC avait enregistré un succès par trop éclatant avec le plébiscite, le 24 septembre dernier, des lois sur l'asile et les étrangers qui lui tenaient tant à cœur. Revers de la médaille, cela lui coupe l'herbe sous les pieds. Avec un tel scrutin, la politique d'immigration et d'asile est forcément mise en veilleuse. A la veille du renouvellement des Chambres fédérales, il fallait donc trouver une astuce pour exploiter ce thème électoralement si fructueux. Avec la remise en cause de la norme antiraciste avalisée de justesse par le peuple en 1994, c'est fait. Christoph Blocher a décoché ses premières flèches en Turquie. Aujourd'hui, les troupes démocrates du centre instrumentalisent la suppression de l'article 261 bis du code pénal comme thème majeur de la prochaine campagne électorale. Cela va faire mal car, comme on pouvait le craindre en 1994, les assurances données alors par Arnold Koller, ont trop souvent été ignorées par les tribunaux. L'idée était de s'en prendre aux clairs appels publics à la haine et à la discrimination. Arnold Koller promettait que la table du café du commerce resterait du domaine privé. Or, comme s'il n'avait pas lu les procès-verbaux des débats aux Chambres, Mon Repos a massivement étendu le champ d'application de la norme contre le racisme. Dès lors, la table de bistrot, voire la cabane forestière sont devenus des lieux publics dangereux. La moindre blague raciste ou une remarque injurieuse risque d'être poursuivi pénalement.
Selon le Conseil fédéral, un article pénal contre la discrimination raciale «ne peut se passer de notions juridiques imprécises». L'UDC estime qu'une telle affirmation confirme le bien-fondé des doutes quant à la praticabilité de l'art. 261bis du code pénal. Dans ces conditions, il est difficile pour le citoyen de comprendre ce qui relève du pénal. Certes, l'UDC fait fort en exigeant la suppression de cette disposition. Ce parti donne dans la légèreté en estimant que si cela conduit la Suisse à dénoncer la Convention internationale contre le racisme, il n'y a qu'à le faire. Ou au moins formuler des réserves, à l'exemple des Etats-Unis qui font primer leur article constitutionnel sur la liberté d'expression. Trop bien intentionnés, les juges sont allés si loin que l'on s'interroge aussi sur la marge de manœuvre qui reste aux historiens. Doivent-ils se plier au politiquement correct? Un débat s'impose. La frontière entre liberté d'expression et poursuite au titre de la norme antiraciste doit être précise aux yeux de tous.
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