vendredi 24 février 2006

De retour au pays, les sans-papiers peinent à se réinsérer

Lire l'article de Mario Togni dans le Courrier
Deux étudiants de la Haute école de travail social de Genève signent un mémoire sur la réinsertion des sans-papiers équatoriens ayant quitté la Suisse, de gré ou de force.

Quelle réinsertion pour les sans-papiers de retour au pays? A ce jour, peu de chercheurs se sont intéressés à «l'après expulsion» des clandestins ayant séjourné en Suisse. C'est chose faite avec le mémoire de Mikhael de Souza et Bastien Carillo, étudiants à la Haute école de travail social (HETS) de Genève. Ces deux jeunes chercheurs se sont plus particulièrement penchés sur le cas des ressortissants équatoriens ayant une longue tradition migratoire avec la Suisse.
Grille d'entretien à l'appui, de nombreux témoignages de sans-papiers ou ex-sans-papiers ont été recueillis en Suisse, en bonne partie dans le canton de Vaud, mais aussi en Equateur, grâce au soutien de la Direction du développement et de la coopération (lire ci-dessous) et de la fondation Terre des Hommes. Un matériau complété par la voie de collectifs de défense de sans-papiers, de travailleurs sociaux, de diplomates et même de policiers.


Rupture des liens sociaux

Si une «prudence statistique» s'impose, les conclusions confirment les tendances envisagées: «La majorité des migrants retournés au pays rencontrent de graves problèmes et peinent à se réinsérer.»
En cause notamment: la rupture, plus ou moins durable, des liens familiaux. Certains migrants ressentent un décalage profond de mode de vie avec leurs proches. Sans compter que l'expérience professionnelle acquise en Suisse (travaux ménagers, restauration...) se révèle souvent inadaptée au marché de l'emploi équatorien. «Seule la moitié des gens rencontrés avaient retrouvé du travail», poursuivent les chercheurs.
Une situation qui se traduit parfois par un sentiment de «peur de l'Equateur». Conséquence première de cela: «De nombreux 'retornados' cherchent à revenir en Suisse, malgré la répression et l'illégalité de leur situation.»


Aide au retour alibi?

Ce qui pose naturellement la question de l'efficacité des programmes suisses d'aide au retour. Les autorités tessinoises, qui avaient découvert en 2003 de nombreux sans-papiers équatoriens, tous originaires du même village, ont finalement envisagé un projet de développement dans la région.
Une expérience assez spécifique et très différente du projet de bureau de consultation vaudois, qui propose une aide psychologique, administrative, financière et permet notamment aux enfants de terminer leur année scolaire.
D'emblée, les deux étudiants précisent: «Il ne s'agit pas de trouver des stratagèmes politiquement corrects pour permettre que les personnes partent. Chacun devrait avoir le droit de choisir où il veut vivre. Ce qui inclut aussi le droit de ne pas migrer.»
Mais ils n'en sont pas moins convaincus qu'une aide au retour et à la réinsertion intelligemment menée peut réellement améliorer les conditions de vie dans les pays d'origine, réduire les inégalités et la pression migratoire. En se préoccupant notamment des objectifs initiaux qui ont conduit la plupart des personnes rencontrées à venir en Europe: l'acquisition d'une maison au pays, la mise sur pied d'un petit commerce et la possibilité d'offrir des études de qualité à leurs enfants.

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