Dans 24 heures, Grégoire Nappey donne la parole aux responsables du SPOP qui expliquent comment ils "appliquent les lois fédérales".
La crise qui déchire le canton de Vaud autour des «523» requérants d’asile déboutés (en réalité encore environ 270) exacerbe passions et récupérations politiques. Mais, dans les faits, comment le canton applique-t-il les lois fédérales? Quel degré de zèle met-il dans les mesures de contrainte? Le chef du Service de la population (SPOP), Henri Rothen, et son chef de la Division asile, Erich Dürst, répondent.
Base légale La loi fédérale sur l’asile respecte et met en œuvre le droit international: la Convention sur le statut des réfugiés (1951). Le principe de base est qu’une personne persécutée dans son pays a le droit de chercher protection dans un Etat tiers.
» Obtention de l’asile Dépôt de demande, auditions: si le cas ne se règle pas vite, le requérant est attribué à un canton, le temps de la procédure. L’Office fédéral des migrations (ODM) statue ensuite d’abord sur l’entrée en matière, puis sur l’accord de l’asile; l’instance de recours est la Commission de recours en matière d’asile (CRA).
» Renvoi «En cas de rejet de la demande et de renvoi de Suisse, l’autorité fédérale examine d’office si le renvoi est licite et raisonnablement exigible, explique Erich Dürst. L’examen se fait en mettant en regard la situation ici de la personne et celle du pays où elle doit rentrer, ainsi que les obligations internationales de la Suisse.» Tout élément nouveau permet de demander le réexamen, et le cas échéant, de recourir, ce qui explique que certains dossiers semblent ne jamais se fermer. Le renvoi doit aussi être pratiquement possible. Car le débouté doit avoir une pièce d’identité, fournie par son pays. «Dans certains cas, nous n’arrivons pas à l’obtenir, explique Henri Rothen. Si l’on croit parfois que le non-renvoi de requérants délinquants découle d’un certain laxisme, c’est faux! Il se trouve qu’il est plus facile de traiter avec certains pays qu’avec d’autres. Dans les Balkans par exemple, cela s’avère plus faisable.» Un blocage sur ce plan, s’il ne résulte pas du comportement de l’intéressé, est le seul cas où le canton peut demander à Berne une admission provisoire. En fait, le canton n’est que compétent pour l’exécution du renvoi.
» Mesures de contrainte Si la personne a refusé tant l’aide au retour que le premier plan de vol, le SPOP sollicite le juge de paix (qui peut lui-même recourir à la police cantonale) pour une détention administrative, moyen donné aux autorités pour appliquer le renvoi. C’est en tout cas dans ce seul sens que les Vaudois l’entendent; moins libéraux, d’autres cantons les utilisent plus souvent, parfois comme moyen de pression. Vaud se distingue encore en n’appliquant pas les mesures aux mineurs, alors que la loi fixe la limite à 15 ans révolus. Erich Dürst: «Nous avons tendance à n’appliquer les mesures que sur le père, considérant que c’est suffisant pour assurer le renvoi de toute la famille.» On essaie d’abord de placer la personne dans un vol régulier. Si elle manifeste avec force son refus au moment de l’embarquement, le commandant de bord a le droit de refuser le passager. Ce qui contraint alors le canton à faire recours à un vol spécialement affrété par l’ODM, avec accompagnement policé.
» Droits des enfants A l’heure du renvoi se pose notamment la question du respect de la Convention internationale des droits de l’enfant (CDE): peut-on renvoyer une famille entière? Un juriste pro-asile s’en est inquiété par avis de droit dans le cadre de la crise des «523». Le problème est que, s’il y a une faille, c’est à Berne et à ses lois qu’il faut s’attaquer. Et non au canton de Vaud. Au moment du renvoi, l’ODM fait-il un examen spécifique du cas au regard de la CDE? En tous les cas, Erich Dürst n’a jamais eu vent d’un recours devant la CRA sur cet aspect.
» «523» Pour les requérants dépendant de la circulaire Metzler, Vaud se veut encore plus libéral. «Il est inadmissible de dire que nous n’explorons pas toutes les pistes et ne respectons pas le droit, avance Henri Rothen. Dans le cas du requérant kosovar qui n’est finalement pas parti vendredi (lire encadré), le dossier a été déjà réexaminé onze fois!»
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