mercredi 10 août 2005

Bosnie: des traces de guerre encore bien visibles


Quelques semaines après son retour d'une visite en Bosnie (voir article précédent du blog) Marlyse Dormond-Béguelin parlementaire socialiste vaudoise partage ses réflexions avec les lecteurs de 24heures.
Lors du voyage en Bosnie de neuf parlementaires fédérales (à leurs frais), début juillet, nous avons pu nous rendre compte de la situation sur place.
Nous avons vu un pays avec des traces de guerre encore bien visibles. Marques physiques (façades striées de traces de balles, maisons détruites, champs de mines en bordure des routes) et humaines (personnes gravement traumatisées dans leur corps et/ ou leur psychisme). La guerre a fait 250 000 morts et détruit 50% des infrastructures, 2 millions de personnes ont été déplacées (1 million dans le pays et 1 million à l'étranger). La moitié est rentrée, mais seuls 20% ont pu s’installer dans leur région d’origine. Des camps de réfugiés existent encore et de nombreuses personnes résident dans leurs familles, loin de leur village. Pour la région de Tuzla, quatre camps sont encore occupés. En raison d’un fort sentiment d’insécurité, il n’est souvent pas envisageable, pour des victimes des massacres de Srebrenica, de retourner dans leur maison, leurs bourreaux habitant en toute liberté dans le village voisin.
La Bosnie est le pays le plus pauvre des Balkans après l'Albanie. Le taux de chômage est de 40% et ceux qui travaillent ne sont pas toujours payés. Les employés du service social de Tuzla n’ont pas eu de salaire durant cinq à neuf mois en 2004. Comme il n’y a pas de travail ailleurs, ils sont restés en espérant que la situation s’améliore. L’économie du pays est dans un état de délabrement consternant. Dans la région de Srebrenica, le chômage avoisine 80%, bien qu’une usine ait ouvert. Elle a surtout engagé des personnes serbes, son personnel est complet et il n’y a plus de place pour de nouveaux travailleurs. C’est dire s’il n’y a pas d’espoir actuellement pour de nouveaux arrivants.
Le directeur du Centre social de Tuzla dresse un sombre tableau de la situation. Le pays n’a pas de système social, ce qui provoque de grandes disparités entre les régions. Certaines n’ont pas de système social et d’autres le réserve à leurs habitants d’origine, ce qui exclut les victimes de la guerre déplacées dans le pays. Les professionnels travaillent dans des conditions difficiles et font les pompiers pour les situations urgentes. Le canton de Tuzla (environ 650 000 habitants, un peu moins que le canton de Vaud) n’a que 13 centres sociaux, soit 32 employés dont 2 ou 3 psychologues. Le service pour les personnes invalides est au 4e étage d’un immeuble sans ascenseur et les personnes handicapées sont reçues au bas de l’escalier dans un corridor ouvert à tous vents.
L’aide au retour permet, avec d’autres aides comme Caritas, de remonter les murs d’une maison. Mais, souvent, les réfugiés doivent en assumer l’équipement (électricité et eau), ce qui représente une lourde charge. Pour 2003 à 2006, la Suisse a attribué 10 millions de francs dans le cadre de l’aide au retour pour les personnes des Balkans. Sur ce montant, confié à la DDC, 5,6 millions sont déjà investis et 2,4 millions planifiés. Jusqu’à ce jour, 26 familles (55 personnes) sont rentrées en Bosnie et ont reçu des prestations pour un total de 153 000 francs (aide financière, reconstruction du logement, etc.).
Dans cette situation, nous estimons (Anne-Catherine Menétrey, Marianne Huguenin et la soussignée) qu’en considération de notre Constitution fédérale sur le respect de la dignité humaine, la Suisse ne doit pas forcer des personnes à rentrer en Bosnie. L’Etat doit aider ceux qui veulent rentrer et permettre aux autres de se rendre chez eux pour évaluer la situation.

Marlyse Dormond-Béguelin
Conseillère nationale

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