Le rapport de la commission nationale consultative des droits de l’homme est sans ambigüité : les Maghrébins sont toujours la cible privilégiée du racisme, la tolérance recule, les actes racistes sont en baisse, l’islamophobie n’a jamais été aussi prononcée.
Après les polémiques sur les Roms, l’immigration (légale et illégale), l’identité nationale, la burqa, l’Islam, les Quick hallal, le nombre de musulmans, il n’est pas étonnant de voir l’islamophobie progresser en France. Le rapport de la Commission nationale des droits de l’homme (CNCDH) dresse une photographie sur le racisme en France. Ainsi, le nombre global des actes à caractère raciste et antisémite a marqué un «net recul» en 2010, mais ceux visant la communauté musulmane ont connu une hausse, ainsi que les «sentiments xénophobes». D’après le rapport annuel de la CNCDH qui s’appuie sur les statistiques du ministère de l’Intérieur, 886 faits à caractère raciste et xénophobe ont été dénombrés en 2010, dont 165 actes violents et 721 menaces ou actes d’intimidation, soit une baisse de 13,6% par rapport à 2009.
En tête des régions concernées, figurent l’Ile-de-France, Rhône-Alpes et le Nord-Pas-de-Calais. L’année 2010 a également été marquée par une «forte baisse» (-43%) des violences et menaces à caractère antisémite, après leur très nette augmentation en 2009 liée à «l’offensive israélienne sur la bande de Gaza». Les Maghrébins sont restés la cible privilégiée du racisme (36% du volume global des démonstrations racistes). «L’année 2010 a été marquée par une hausse des atteintes à la communauté musulmane», affirme la commission, avec 22 actes et 87 menaces recensées.
Treize mosquées ou lieux de culte musulmans ont notamment subi des actions violentes, contre six en 2009.
«Je ne suis pas raciste, mais je comprends les racistes»
«La fin de 2009 et l’année 2010 ont été ponctuées par des débats de société sur la construction de minarets, le port du voile intégral et l’identité nationale, ce qui a pu alimenter un sentiment antimusulman au sein d’une certaine frange de la population», commente la commission. Ainsi, malgré la tendance à la baisse, en 2010, des manifestations de racisme et d’antisémitisme, «la tolérance recule, les sentiments xénophobes se diffusent et le lien entre immigration et insécurité est considéré comme avéré pour beaucoup, alors que perdure l’image de l’étranger parasite», s’inquiète la CNCDH .
Un sondage CSA réalisé en janvier et publié dans le rapport en témoigne : 48% des personnes interrogées estiment que les musulmans forment un groupe à part dans la société (+4 points à rapport à 2009) et 56% des sondés jugent qu’il y a trop d’immigrés en France (+9 points sur un an). «Nous nous sommes aperçus qu’il existait une forme de banalisation du racisme, ainsi qu’une forme de décomplexion dans le discours politique», déplore Martine Brousse, vice-présidente de la CNCDH.
Selon Pierre Fournel, directeur général de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), la décision d’évacuer les campements illicites de Roms et le fameux discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy ont marqué «une vraie rupture», avec une «ethnicisation des problèmes sociaux qui engendre forcément une libération de la parole raciste», de pair avec «la résurgence de l’extrême droite en France». Le racisme explose littéralement sur Internet avec une augmentation de plus de 74% en un an. Le rapport relève que le nombre de personnes se déclarant «non racistes mais comprenant très bien que les autres le soient» est très alarmant.
Walid Mebarek, correspondant à Paris pour El Watan
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