mercredi 23 juin 2010

Premier président noir d’un conseil communal

En accédant hier soir à la présidence de l’organe délibérant de Moudon, Oscar Nkezabera entre dans l’Histoire vaudoise: c’est le premier homme de couleur à accéder à une telle fonction.

Oscar Nkezabera

Le 1er Août, c’est lui qui portera le toast à la patrie devant la population de Moudon. A 46 ans, Oscar Nkezabera a été élu hier soir au perchoir de sa commune. Le 1er juillet, il deviendra ainsi le premier citoyen de l’ancienne capitale des Etats de Vaud. Tout un symbole pour cette petite ville qui cultive l’intégration de ses communautés. Rwandais d’origine, arrivé en Suisse à l’âge de 22 ans dans le cadre d’une mission catholique, ce fervent pratiquant est le premier homme de couleur à accéder à cette place dans le canton.

«C’est formidable, ça montre que la politique d’intégration de Moudon porte ses fruits!» s’exclame Nicole Grin, secrétaire de l’Union des communes vaudoises (UCV).

Un honneur? «Forcément, ça me fait plaisir, répond Oscar Nkezabera. Mais je ne me sens pas porte-parole de grandes causes ou de grands discours multiculturels pour autant. Politiquement, je m’investis essentiellement sur le plan local. C’est là qu’il y a du travail à faire.» Ses causes? Les minorités, la jeunesse désœuvrée ou les retraités aux revenus modestes. «C’est dans ma nature, je prends toujours le parti des plus faibles. Ce sont eux qu’il faut aider.»

Intégration résolue

L’investissement de soi, c’est la meilleure forme d’intégration qu’il a trouvée. Et de citer un dicton rwandais: «Si tu vas chez quelqu’un où on mange des mouches, tu les manges aussi crues. En arrivant en Suisse, c’est ce que j’ai fait. Je me suis intégré aux us et coutumes. C’est moi qui suis allé à la rencontre des autres. Il n’y a qu’à me regarder… je ne pourrai jamais cacher que je suis étranger», lâche-t-il dans un sourire. L’homme a de l’humour, joue avec les mots. «Je suis un homme de transparence, je suis très clair là-dessus (rire s).»

Technicien en informatique, marié, père de quatre enfants, Oscar Nkezabera a été naturalisé par son mariage. Entré au Conseil communal en 2004 en cours de législature, il a été brillamment réélu en 2005. C’est lui qui s’est intéressé à la politique. «J’avais envie de faire quelque chose pour ma commune. Je suis allé suivre des séances d’information, je me suis renseigné. Je n’ai pas attendu que l’on vienne me chercher.»

Forcément, au groupe Suisses-étrangers de Moudon, on se frotte les mains. D’autant qu’un autre homme de couleur, le Somalien Diiriye Khayre Yusuf, siège au parlement communal. «Dans une commune qui compte 40% d’étrangers et plus de soixante nationalités, l’élection d’Oscar est un symbole très fort», se réjouit David Gun, du comité.

«Sagesse africaine»

A la Commission de gestion et des finances, où il siège encore, Oscar Nkezabera est vu comme un conseiller «compétent et sérieux». Dans les rangs du PS, on apprécie ses interventions: «C’est un homme de consensus. Oscar a l’art de remettre l’église au milieu du village. Il porte un autre regard sur les choses. Un peu de sagesse africaine sans doute. Et ça nous apporte beaucoup .»

CHRISTIAN AEBI dans 24 Heures

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