mardi 2 mars 2010

1er mars, journée sans travailleurs immigrés

Les syndicats de plusieurs pays européens appellent tous les travailleurs immigrés et clandestins à ne pas se présenter devant leur employeur ce lundi, afin de montrer qu’ils sont indispensables à l’économie mondiale. En Suisse, le mouvement est plus limité, même si la problématique est bien présente.

Le site français qui appelle à la mobilisation compte plus de 72'000 sympathisants sur Facebook. (Source: la-journee-sans-immigres.org)

La situation de travailleurs sans papiers actifs dans le secteur des ménages à domicile est particulièrement précaire. (Photo: Keystone)

«Oui, je sais que c’est La Journée sans Immigrés, lâche Gilberto, employé d’origine portugaise, qui exerce sur le chantier du tram à Genève. Mais je ne sais pas à quoi elle correspond.» Les signes d’une action syndicale de grande ampleur sont effectivement absents, ce lundi, dans la Cité de Calvin.

«C’est surtout pour se montrer solidaire du mouvement», rétorque Philippe Sauvin, actif au sein de L’Autre syndicat, rare association du bassin lémanique à avoir repris le mot d’ordre des syndicats étrangers. En effet, seules la distribution de tracts et l’organisation d’une soirée d’information et débats marqueront cette journée d’action, proclamée notamment en France et en Italie.

Mais il en est convaincu, si les travailleurs en situation irrégulière s’arrêtaient vraiment de travailler pendant 24 heures, l’économie helvétique serait paralysée.

100'000 travailleurs clandestins en Suisse?

Car le problème existe bel et bien en Suisse, relance Philippe Sauvin. Environ 100'000 sans papiers travailleraient actuellement dans le pays, et la plupart du temps dans des conditions très difficiles. Des horaires aléatoires, un salaire au-dessous des normes et la peur de se faire expulser du pays, alors qu’ils payent leurs impôts et leurs assurances maladies, sont les principaux problèmes auxquels ils doivent faire face.

Et rien n’est fait pour changer la donne, dénonce-t-il, «il y a un intérêt généralisé pour que la situation ne bouge pas». De nombreux secteurs – comme les ménages à domicile, les nettoyages, ou encore l’agriculture et le bâtiment – ont besoin de cette main d’œuvre peu qualifiée qu’ils peinent à trouver en Suisse. Et certains patrons peu scrupuleux n’hésitent pas à abuser de la détresse de ces gens.

Unia se concentre d’abord sur les enfants d’immigrés

L’Autre syndicat, au slogan de «Un permis de travail pour chaque permis de séjour», demande ainsi la régularisation de tous les travailleurs sans papiers, pour leur offrir une existence digne. Une solution vraiment réaliste, alors que la conjoncture économique actuelle est difficile? Oui, estime Philippe Sauvin, qui prend l’exemple de l’Espagne, qui aurait appliqué et réussi cette politique.

De son côté, le syndicat Unia a choisi d’empoigner le problème différemment, et de ne pas particulièrement appeler à la mobilisation en ce 1er mars. «On essaie de rester pragmatique, reconnaît Anahid Pasha-Khani, secrétaire syndicale pour Unia-Genève. Il y a quand même une réalité politique qui nous empêche de tout demander d’un coup.» Pour cette raison, Unia se concentre dans un premier temps sur la régularisation des enfants de travailleurs sans papiers, revendication qui fait l’objet d’une campagne de sensibilisation fédérale.

Entre 5'000 et 10'000 travailleurs sans papiers à Genève

A l’Union des Associations Patronales Genevoises (UAPG), on ne nie pas la situation actuelle. «Le problème du travail illégal à Genève est réel, affirme Sabine von der Weid, secrétaire permanente de l’UAPG. Mais pour l’heure, nous sommes dans un Etat de droit, et il est nécessaire de changer la loi pour trouver une solution. Et Berne a le dernier mot en la matière.»

Pour Sabine von der Weid, une régularisation des travailleurs illégaux du canton – au nombre de 5'000 selon l’UAPG et de 10'000 selon Unia – serait toutefois gérable, à condition de l’encadrer de manière stricte, et de ne pas trop densifier le flux migratoire.

Quant aux patrons voyous, qui ne respectent pas les règles, il existe à Genève un groupe exploratoire qui se réunit tous les trois mois pour analyser la situation du marché du travail local, explique-t-elle. Et en moyenne, ce groupe découvre que 7 à 12% des employeurs contreviennent à la loi, et que 5% d’entre eux commettent des infractions graves qui nécessitent l’intervention de l’UAPG.

20minutes.ch

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