Paru le Mercredi 29 Octobre 2008 - OLIVIER CHAVAZ
Genève MESURES DE CONTRAINTE - La Ligue suisse des droits de l'homme
dénonce une nouvelle fois l'absence de suivi médical au centre de
détention pour étrangers, où de nombreuses personnes souffrent de
troubles psychiques.
Deux hommes incarcérés à Frambois en attente de leur renvoi ont
récemment tenté de mettre fin à leurs jours. Il s'agit d'une nouvelle
illustration de la détérioration des conditions de détention à la prison
pour étrangers, a indiqué hier dans un communiqué de presse la section
genevoise de la Ligue suisse des droits de l'homme (LSDH). L'association
exhorte les autorités des trois cantons concernés par Frambois – Genève,
Vaud et Neuchâtel – à renforcer l'encadrement médical de l'établissement
concordataire ouvert en 2004 à Vernier.
Ces tentatives de suicide ont toutes deux eu lieu le 26 septembre
dernier. La première concerne un Kosovar de 27 ans, débouté de l'asile.
Détenu depuis début septembre, il a tenté de s'immoler par le feu. La
seconde a été le fait d'un Nigérian de 19 ans, dont la demande d'asile a
été frappée d'une non-entrée en matière. A Frambois depuis le printemps
dernier, il s'est pendu aux barreaux de sa cellule. L'intervention des
surveillants a permis d'éviter la mort de ces deux personnes. Après une
brève hospitalisation en psychiatrie, ils ont été reconduits en prison.
La LSDH alerte régulièrement les autorités sur les carences en matière
de prise en charge médicale à Frambois. En vain. Dans son dernier
rapport sur l'établissement carcéral pour étrangers, les défenseurs des
droits de l'homme réclamaient notamment que «les soins médicaux soient
accessibles» et que «les mesures de contrainte ne soient pas utilisées
dans le cas des personnes souffrant de troubles mentaux ou dont l'état
de santé est particulièrement préoccupant». Selon la LSDH, les détenus
eux-mêmes se plaignent de cette situation.
«Ces deux cas illustrent parfaitement le problème, explique Orlane
Varesano, membre du comité de l'association. L'un a été incarcéré alors
qu'il était déjà dans une profonde détresse psychique et l'autre a vu
son état se détériorer au fil des mois, ne sachant pas où en était sa
procédure.» Pour elle, ces événements ont eu de lourdes conséquences sur
le moral de l'ensemble des détenus de Frambois, dont la plupart sont
fragilisés par l'incertitude pesant sur leur sort et par
l'incompréhension que suscite leur détention. «Nous sommes conscients
qu'il n'est pas possible d'avoir un médecin sur place vingt-quatre
heures sur vingt-quatre, mais nous demandons au moins une visite
quotidienne», précise la militante.
Secrétaire général du Département genevois des institutions, Bernard Gut
affirme de son côté qu'il est erroné de lier strictement les conditions
de détention et les tentatives de suicide. «Mais il est vrai, en
revanche, que de plus en plus de personnes arrivent à Frambois avec de
gros problèmes psychiques», reconnaît-il. Ces détenus font alors des
allers et retours entre la prison et des services médicaux extérieurs.
«C'est à ce niveau qu'on pourrait améliorer le système de prise en
charge. Des discussions sont prévues dans le cadre du concordat», ajoute
le haut fonctionnaire.
Enfin, un problème particulier se pose avec les détenus dépendant d'un
canton non concordataire, comme c'est le cas du jeune Nigérian, placé à
Frambois par les autorités tessinoises. «Le suivi de leur dossier est
plus compliqué. Ce sont un peu des laissés-pour-compte», admet Bernard
Gut. I
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