mercredi 16 avril 2008

France : lettres publiées pour raconter des histoires de clandestins

"Mon village à l'heure d'Hortefeux"

NOUVELOBS.COM | 16.04.2008 | 10:22


Nouvelobs.com publie une série de lettres écrites au ministre Brice Hortefeux, pour lui raconter des histoires de clandestins. Ce travail, réalisé avec le réseau RESF, est coordonné par Florence Aubenas.

C'ÉTAIT une idée un peu banale, presque scolaire, qu'avait eu le Réseau Education Sans Frontière (RESF) pour sa dernière campagne de soutien aux Sans-Papiers : écrivez une lettre au ministre de l'Intégration et de l'Identité nationale, Brice Hortefeux, pour lui raconter une histoire de clandestin.

Plus de 600 courriers ont été envoyés. Pour voir, on en lit un. Puis deux. Et on voudrait les lire tous : c'est un trésor. On y apprend, bien entendu, des nouvelles de familles géorgiennes, kurdes ou congolaises, mais aussi -et là surgit sans doute la plus grande surprise- des nouvelles de familles françaises. En filigrane, c'est "mon village à l'heure d'Hortefeux" dont ces lettres tracent la chronique, le portrait d'une France qui s'indigne de ce qu'elle découvre sur elle-même.

"Une mère en plein désarroi vous écrit … ", commence une lettre. "Je n'imaginais pas de telles choses possibles chez nous… ", continue une autre. "La révolte m'a pris, je ne reviendrais plus en arrière", poursuit une troisième.

"Nous vivons un moment, où le regard d'une société est en train de changer sur les Sans-Papiers ", dit Armelle Gardien, documentaliste, une de celle qui a dépouillé les courriers pour RESF et voudrait aujourd'hui en confier l'analyse à un chercheur. Selon elle, la majorité des signataires ne sont pas les militants les plus visibles du réseau, au contraire.

En les lisant, on sent d'ailleurs souvent ces épistoliers troublés d'avoir à tracer des mots qu'on ne convoque généralement que sur les fronton des mairies ou dans les cérémonies officielles: "déclaration des droits de l'homme ", "liberté-égalité-fraternité ", "patrie ". Eperdus dans une situation que la plupart découvrent, certains se raccrochent à des analogies, évoquent la "résistance " ou "la guerre d'Algérie ". Un jeune professeur: "C'est en tout cas la première fois que j'ai l'impression d'avoir à choisir un camp, et de faire l'histoire, avec un grand H, comme celle que j'enseigne à mes élèves".

Florence Aubenas

Lectures. Les lettres que nous publions ont été choisies par la rédaction du Nouvel Observateur : des extraits d'entre elles sont visibles sur le magazine Le Nouvel Observateur en vente jeudi 17 avril. Des lectures publiques sont en préparation. L'une a déjà eu lieu à la Cartoucherie de Vincennes, sous la direction d'Ariane Mnouchkine, avec Jeanne Moreau.

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